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Merci pour le chocolat (2000) Claude Chabrol

Merci pour le chocolat (2000) Claude Chabrol

Publié le 2 déc. 2020 Mis à jour le 2 déc. 2020 Culture
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Merci pour le chocolat (2000) Claude Chabrol

Le feu sous la glace 

Lorsqu’il tourne Merci pour le chocolat, Claude Chabrol sort de la décennie des années 1990 quasiment égrenée par un film tous les ans, de Madame Bovary à Au cœur du mensonge, en passant par La cérémonie. Il s’entoure encore de fidèles collaborateurs, en tête desquels le producteur Marin Karmitz, qui l’accompagne depuis les années 1980. Bien sûr sa famille est de la partie, puisque son épouse Aurore Chabrol travaille sur le script et que son fils Matthieu signe, comme depuis Les fantômes du chapelier, la bande originale, à laquelle il faut ici ajouter quelques morceaux de musique classique, élément fondamental du film. Notons aussi l’apparition au générique de la costumière Élisabeth Tavernier tandis que le rôle principal du film est dévolu à Isabelle Huppert, régulièrement au casting des films de « Chacha » depuis Violette Nozière. On doit le matériau du scénario à une romancière américaine assez peu connue, Charlotte Armstrong, dont quelques romans avaient été adaptés cinquante ans auparavant.

Le célèbre pianiste André Polonski et Marie-Claire Muller, dite « Mika », s’unissent pour la seconde fois à la mairie de Lausanne. Lors du pot qui suit la cérémonie, les conversations tournent autour de l’empire industriel familial dont Mika est héritière, et qu’André n’a jamais souhaité diriger, privilégiant sa carrière artistique, au grand dam du son beau-père, aujourd’hui décédé. On espère beaucoup de son fils Guillaume, à la personnalité effacée et qui ne suit pas très assidument ses études. On le félicite pour l’organisation de l’exposition, financée par Mika, de photographies de sa mère, la première épouse d’André. Pendant ce temps, sur les bords du lac, Louise Pollet discute avec son amie Nathalie avant l’arrivée de sa fille Jeanne et de son petit-copain, le fils de Nathalie. Au cours du repas, celle-ci évoque les circonstances de la naissance de Jeanne, que la jeune fille ne semble pas connaître. Le même jour naissait le fils d’André Polonski et quand le pianiste est venu à la maternité, l’infirmière lui a dit par erreur que Louise était sa fille.

L’introduction de Merci pour le chocolat est un exemple de mise en contexte. Les principaux traits des personnages nous sont brossés en quelques scènes, et le nœud de l’intrigue est dévoilé. Nous sommes donc en présence d’une riche héritière et de son époux dépressif, qui ont un fils lymphatique et des amis persifleurs. On retrouve ici les traits d’une certaine bourgeoisie de province que Claude Chabrol aime tellement dépeindre. Notons qu’ici l’auteur sort de ses habitudes puisqu’il transpose ce petit univers feutré en Suisse, et l’on se rend compte que les ressorts sociologiques ne sont pas très éloignés d’un pays à l’autre. Puis on passe dans un milieu un peu moins favorisé, avec la présentation d’une jeune femme qui fantasme sur la vie qu’elle aurait pu avoir, compte tenu des circonstances de sa naissance. Notons au passage l’ironie dont fait preuve le réalisateur, qui étouffe dans l’œuf les reproches de plagiat que l’on pourrait lui faire, se moquant ouvertement du parallèle avec La vie est un long fleuve tranquille.

L’espièglerie de Claude Chabrol ne s’arrête pas là, le réalisateur s’attachant à démonter pas par pas les mécanismes du thriller, cadre apparent mais trompeur de Merci pour le chocolat. Ainsi quasiment tous les personnages du film ne sont pas tels que le spectateur pourrait s’attendre. Les archétypes de la victime et du bourreau potentiels se déconstruisent progressivement au cours d’une intrigue qui avance par petits pas. Les fils de la narration sont tissés lentement, à un tel point qu’on se demande souvent où va nous emmener cette histoire qui revêt les apparences de la banalité. Pourtant dès le début les fondamentaux du drame qui se déroule devant nos yeux nous sont clairement présentés. On découvre vite l’ambiguïté de ce personnage qui agit de façon étrange, et l’apprend très rapidement les événements originels qui sous-tendent les relations entre les personnages. C’est donc, dans la plus pure tradition classique, la tension psychologique qui va mouvoir les actions des uns et des autres.

Les ressorts psychiques sont ainsi le cœur de Merci pour le chocolat. Le manque de motifs apparents des méfaits qui traversent le film, ainsi que les divers actes manqués qui émaillent l’action, nous poussent à chercher du côté de la personnalité des protagonistes, élégamment dépeints par le scénario. D’une certaine façon, le film travaille le vide, l’absence, le manque ; et à ce titre les liens familiaux, au cœur de l’intrigue, nous donnent de nombreuses clés de réflexion. L’œuvre de Claude Chabrol questionne les idées de présence ou d’absence d’instinct paternel ou maternel, de liens du sang ou d’héritage. Le réalisateur sert sur un plateau à Isabelle Huppert un rôle à sa mesure, où elle peut développer avec merveille ses talents pour l’ambiguïté. La figure de Jacques Dutronc l’accompagne parfaitement, avec son visage placide qui cache ses émotions. La jeune Anna Mouglalis, alors au tout début de sa carrière, complète idéalement le casting, avec sa voix rauque instaurant inconsciemment une ambiance de mystère élégant.

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