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Douleur et gloire (2019) Pedro Almodóvar

Douleur et gloire (2019) Pedro Almodóvar

Publié le 9 août 2022 Mis à jour le 9 août 2022 Culture
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Douleur et gloire (2019) Pedro Almodóvar

Les souvenirs et les regrets aussi

Officiellement sans s’en rendre compte, Pedro Almodóvar clôt avec Douleur et gloire une trilogie que l’on peut considérer comme une variation de l’autofiction au medium cinématographique. Il l’avait débutée en 1987, avec La loi du désir, qui mettait en scène un cinéaste homosexuel en proie à une libido débridée. Plus de quinze ans plus tard, Almodóvar évoque une fois de plus un réalisateur, dans La mauvaise éducation. Celui-ci se souvient des mauvais traitements dont il a été victime durant son enfance dans une école religieuse. Dans ce troisième opus qui n’en est pas un, et qui est sorti encore quinze années plus tard, le personnage principal, réalisateur, alterne des séquences de souvenir entre son premier émoi sexuel, quand il avait à peine dix ans, et son grand amour, qu’il a quitté il y a des dizaines d’années. Comme le dit le réalisateur madrilène, tout n’est pas autobiographique dans ces récits, mais de nombreux souvenirs ont inspiré des situations dans ces films.

Le début

Au fond d'une piscine, se remettant d’une opération qui lui a laissé une grande cicatrice sur le ventre, le réalisateur Salvador Mallo se souvient de son enfance dans la province de Valence, avec sa mère, et les amies de celle-ci, lavant le linge dans la rivière. Un peu plus tard, le cinéaste, qui s'est éloigné des plateaux de tournage, retrouve, dans un restaurant, Zulema, une amie actrice qu'il n'a pas vue depuis longtemps. Ils évoquent leurs souvenirs communs, elle lui demande de lui écrire un autre rôle, et il l'interroge sur Alberto Crespo, un acteur qu'il n'a pas revu depuis plus de trente ans, quand ils ont tourné ensemble le film Sabor, qui a eu un grand succès. Elle lui donne son adresse et son numéro de téléphone, car à l’occasion de la réédition du long-métrage en version restaurée, Salvador souhaite le présenter avec Alberto. À la faveur d’un morceau joué par un pianiste,  Salvador se rappelle ses premières années de collège, où il avait été sélectionné pour devenir soliste dans la chorale du séminaire.

Analyse

Le dispositif de mise en abîme largement employé dans Douleur et gloire est régulièrement utilisé par Pedro Almodóvar. Déjà Étreintes brisées était basé sur ce schéma narratif, où un réalisateur revenait sur certains éléments clés de son passé. Les différentes temporalités étaient aussi de mise dans La mauvaise éducation, tandis que les références cinéphiles sont nombreuses dans toute l’œuvre du cinéaste. La mécanique des souvenirs qui affluent à la mémoire du personnage principal est ici maîtrisée prodigieusement, les transitions entre les trois périodes différentes qui constituent le récit sont tellement discrète que l’on ne les remarque pratiquement pas. On note ainsi une fluidité dans la mise en scène du film, qui brasse de nombreux sujets lourds (l’addiction, la maladie, la mort, etc.) sans que cela ne soit à aucun moment pesant. Une certaine légèreté se dégage même paradoxalement du film, qui pourtant est loin des exubérances auxquelles le réalisateur a pu nous habituer.

Car Douleur et gloire est d’une sobriété et d’une simplicité assez exemplaire. On pourrait même penser que le film ne possède aucun ressort narratif à proprement parler. Il s’agit uniquement d’un homme d’une cinquantaine d’années qui se trouve dans une situation de crise, à la fois artistique, affective et physique. C’est d’ailleurs quasiment seulement ce dernier aspect du scénario qui fait avancer l’histoire : le suspense le plus intense est pratiquement la problématique des douleurs ressenties par Salvador, et quelle est l’étendue de sa maladie. Le reste des péripéties relèvent du passé, que ce soient les amours du personnage principal, la mort de la mère de ce dernier, figure essentiel du cinéma de Pedro Almodóvar, ou bien les disputes entre lui et Alberto. D’ailleurs, au fur et à mesure de l’acceptation par Salvador qu’il doit s’occuper de ses problèmes de santé, ses conflits sentimentaux s’apaisent, et son inspiration artistique reprend tout à coup de l’ampleur.

Ce resserrement du récit de Douleur et gloire à quelques personnages, quand Pedro Almodóvar est souvent habitué à manipuler une multitude de destins, pousse à une performance d’acteur. Et celle qui livre Antonio Banderas est tout à fait prodigieuse, comme l’ont remarqué les membres du jury du Festival de Cannes, qui lui ont décerné le Prix d’interprétation masculine. Grimé à l’image du metteur en scène qui l’a révélé au grand public, et avec qui il tournera pas loin d’une dizaine de films, l’acteur n’hésite pas à se représenter vieillissant, grisonnant et fragile. On retrouve aussi, de façon plus discrète, quelques figures marquantes du cinéma d’Almodóvar, que ce soit Penélope Cruz une fois de plus en icône idéalisée ou bien Cecilia Roth dans une brève apparition en clin d’œil. C’est ainsi à la fois un film qui s’inscrit en ligne droite dans sa filmographie, avec ses couleurs tout aussi criardes et ses tropismes affectifs, et qui s’en éloigne pour atteindre à une certaine grâce dans l’épure formelle.

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