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Fureur Apache (Ulzana's Raid, Robert Aldrich, 1972)

Fureur Apache (Ulzana's Raid, Robert Aldrich, 1972)

Publié le 27 juin 2020 Mis à jour le 27 juin 2020 Culture
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Fureur Apache (Ulzana's Raid, Robert Aldrich, 1972)

J'ai beaucoup pensé à "L'ennemi intime" de Florian Emilio Siri (2007) en regardant "Fureur Apache" en tant que réflexion par le truchement du western sur les sales guerres asymétriques des années 60-70 (Algérie, Vietnam) qui se transformaient en bourbier insoluble et d'où personne ne sortait indemne. En effet le contexte est très important pour comprendre le film. De même que "Bronco Apache" (1954) du même réalisateur se positionnait en faveur des indiens à une époque où ils étaient dépeints comme des barbares, "Fureur Apache" prend le contrepied des films des années soixante-dix où ils étaient désormais vus comme de "bons sauvages", de "grands enfants" ou de simples victimes. Rejetant donc le manichéisme primaire aussi bien que les clichés colonialistes, Robert Aldrich réalise un western crépusculaire voire nihiliste par son absence d'issue dans lequel on assiste à une explosion d'ultra violence*.

Le film raconte l'histoire d'un groupe d'apaches qui s'échappe d'une réserve dans laquelle ils étaient retenus prisonniers pour se lancer dans une politique de la terre brûlée sur leurs anciens territoires, une sorte de baroud d'honneur désespéré et suicidaire autant que sanguinaire par lequel ils espèrent retrouver un peu de leur puissance guerrière d'autrefois. Ils sont poursuivis par un peloton de la cavalerie américaine qui ne peut que constater les dégâts de leur passage tant leur impuissance est manifeste**. C'est en fait leur propre survie qui est en jeu car ils se sont lancés dans une dangereuse partie de poker menteur avec les Apaches, chacun cherchant à berner l'autre pour lui porter le coup fatal. Comme dans toute guerre asymétrique, ce sont eux qui ont l'avantage car ils connaissent le terrain. Mais comme je le disais plus haut, à ce jeu là, personne n'en sort indemne. Ni les apaches qui se font décimer, ni le jeune et inexpérimenté lieutenant DeBuin (Bruce Davison) qui en étant témoin des atrocités commises par les apaches (meurtres, viols, dépeçages et mutilations) bascule en un éclair de l'idéalisme au racisme primaire et à la tentation de se comporter avec la même barbarie que ses adversaires***. Mais il bénéficie cependant des explications du vieux briscard qui l'accompagne en éclaireur (à tous les sens de ce terme), McIntosh (Burt Lancaster qui jouait l'indien dans "Bronco Apache"), capable de comprendre l'état d'esprit des indiens et leurs motivations profondes derrière la cruauté de leurs actes. La présence de ce personnage est très importante car il désamorce les pulsions haineuses que peuvent ressentir les soldats et par extension les spectateurs. Le fait qu'il soit marié à une indienne ainsi que la présence d'un scout Apache à leurs côtés qui est à leur service en ayant son propre sens de l'honneur invalide complètement l'accusation de racisme qui a été faite à Aldrich à propos de ce film. En effet au-delà de l'effort de compréhension et de la remise en contexte, au-delà du refus de l'essentialisation qui est à la base du racisme ("un bon indien est un indien mort", "ils sont tous pareils" etc.), les cavaliers sont montrés en train de se livrer sur le cadavre d'un apache à des horreurs au moins équivalentes à celles qu'infligent les apaches aux leurs, la violence n'étant pas l'apanage d'un camp****.  Cependant McIntosh se sait condamné au même titre que l'homme qu'il traque, le chef apache Ulzana (dont la mort du fils souligne l'absence d'avenir de son peuple).

* Caractéristiques typiques des années 70 que ce soit pour le nihilisme (exemple "Easy Rider") ou l'ultra violence (exemple "Orange mécanique").

** Le film souligne cette impuissance de façon ironique en faisant à plusieurs reprises sonner le clairon signalant l'arrivée imminente de la cavalerie sans que pour autant elle ne puisse empêcher les exactions commises sur les fermiers ou leurs propres soldats.

*** Ce qui est exactement le parcours du personnage joué par Benoît Magimel dans "L'ennemi intime", un bleu idéaliste d'abord horrifié par la torture systématique pratiquée sur les combattants algériens puis basculant dans la haine aveugle après avoir été témoin des meurtres et mutilations commises par ces mêmes combattants à l'égard des soldats français (la coutume consistant à émasculer les cadavres et à leur enfoncer l'appareil génital dans la bouche est reprise d'une certaine façon dans "Fureur Apache" où un cadavre de fermier atrocement défiguré se retrouve avec la queue de son propre chien enfoncée dans la bouche).

**** "Fureur Apache" a eu une certaine influence sur Stanley Kubrick. J'ai cité "Orange mécanique" mais dans "Full Metal Jacket" il y a une scène qui fait également penser au film d'Aldrich où un soldat américain est pris pour cible par l'adversaire qui le crible de balles à petit feu jusqu'à ce que son propre camp ne décide de l'achever pour lui épargner encore davantage de souffrance.

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