

Chapitre 44 : L’éveil des ombres
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Chapitre 44 : L’éveil des ombres
Chapitre 44 : L’éveil des ombres
— « Cyril… tu vas bien ? »
— « Je sais que vous vous inquiétez pour moi, » répondit-il. « Mais je vais bien. »
Un silence. Tous le savaient, c’était faux. Mais personne n’osa le relever.
— « Je suppose que Carl vous a envoyé la vidéo, à vous aussi ? »
Amélisse hocha la tête sans un mot.
— « Comment tu le sais ? » finit-elle par demander.
— « C’est logique. Et tu le sais aussi, Amélisse. Il veut que tout remonte à la surface. Il veut nous faire tomber. »
On entendit sa respiration à l’autre bout du fil, lourde. Puis sa voix se fit plus ferme.
— « J’ai pris ma décision. Je rentre en France à la fin de la semaine prochaine. Il faut régler cette histoire. Il faut tirer un trait définitif sur tout ça. »
Badou approuva d’un signe de tête, le regard sombre.
— « Enfin un qui parle clair, » souffla-t-il.
Aminata parut soulagée d’entendre une voix sensée.
Marbella, elle, resta de marbre, comme si elle pesait chaque mot de Cyril, chaque intention cachée derrière la voix.
— « Très bien, dit Amélisse. Dis-moi la date et l’heure de ton vol. Je viendrai te chercher à l’aéroport. »
— « Je t’enverrai les détails demain. Là, je dois raccrocher. On se reparle plus tard. »
— « D’accord… à plus. »
La communication se coupa. Un silence lourd retomba sur la table, mais cette fois différent : moins tendu, plus résolu.
Amélisse reposa son téléphone doucement, inspira profondément, puis se réinstalla sur sa chaise. Quelque chose venait de basculer.
Le silence reprit place autour de la table. Yoann croisa les bras, le regard fixe sur le verre de vin devant lui, comme s’il essayait d’y lire l’avenir. Marbella gardait la mâchoire serrée, perdue dans ses pensées. Elle triturait machinalement un pli de sa manche, un tic qu’Amélisse connaissait : signe d’une concentration extrême, ou d’un malaise profond.
— « Il va vraiment revenir… » murmura Aminata, la voix pleine d’émotions contradictoires.
— « Il a raison, » répondit Badou. « On peut pas rester dans cette attente. Cette histoire doit finir. »
— « Ou exploser », souffla Yoann, d’une voix basse mais acide.
Tous tournèrent les yeux vers lui. Il leva la tête, l’air plus grave que jamais.
— « Carl nous pousse dans un coin. Et quand Cyril va débarquer, il va creuser, poser des questions. Et s’il découvre des choses qu’on a volontairement laissé de côté… ? »
Marbella leva enfin les yeux.
— « Il sait déjà. Il était là, je te rappelle. Il sait ce qu’on a fait. »
— « Il sait ce qu’on lui a montré, Marbella, » rétorqua Yoann. « Pas ce qu’on a tous pensé. Ressenti. Caché. »
Un blanc. Le genre de silence où chacun commence à douter de l’autre, et de lui-même.
Amélisse, elle, avait la gorge nouée. L’appel de Cyril, pourtant plein de bonne volonté, avait rouvert la boîte de Pandore.
La table du restaurant, élégante en apparence, devenait soudain une scène d’aveux différés.
— « Il faut qu’on soit prêts, » déclara finalement Marbella.
Elle regarda chacun dans les yeux, un à un.
— « À tout. À l’arrivée de Cyril. Aux questions de la police. Aux pièges de Carl. Parce qu’on est à deux doigts de perdre le contrôle. »
Un murmure d’assentiment parcourut le groupe. Un fragile consensus. Mais derrière les visages tendus, chacun savait qu’il y avait encore des choses non dites. Des vérités inavouées.
Et Carl, quelque part, écoutait peut-être encore.
Image : Canva .
Barbara Wonder

