

Les vautours de papier
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Les vautours de papier
Je suis entré dans la pièce avec la main tremblante de l'alcoolique notoire, le frisson de la peur et le cheveu blanc déjà pointant du souci, bien droit. Rebelle et perturbant.
Quelque part, à l’intérieur, il y a un tiroir fermé qui sent la poussière.
Dans un meuble qui reluit pourtant de cire d'abeille. O’Cédar qui s'agite énergiquement, le pantin de bois articulé qui patine avec élégance comme un danseur étoile. L’imaginer, j’admire et, j’en souris. Effet publicité ancré.
Dans un coin de l’entrée, le vieux portemanteau qui veille dans sa posture de marbre. Œuvre d’art dans le décor quotidien. Celle qu’on ne voit pas. Celle qu’on ne voit plus. Celle qu’on oublie. Presque enterrée. Aucune plainte, pourtant. Pas même la note d’un violon en ambiance de fond.
La masse grise du cerveau qui carbure à la réflexion. Neurones en folie. Pire qu’un feu d’artifice. Sans le bruit.
Saint Antoine de Padoue, faites que mon esprit s'éclaire rapidement comme une ampoule. En échange, je vous réciterai un Je vous salue Marie en bonne et due forme, plein de bonne et belle dévotion. Marché conclu ?
Je dois être bon négociateur ou béni. Dans l’heure, l’Antoine, du fin fond de Padoue città[1] (entre ciel et terre) répond, sans le son. Ainsi soit-il.
Puzzle reconstitué. La passoire qui me sert de cerveau a les trous qui se rebouchent, dans la foulée.
Soulagement et, belle éjection d’un eurêka ! Écho rebondissant contre les murs. On se serait cru dans une salle de squash.
Ça m’a sonné.
Un manuscrit dort dans le tiroir. J’ai dû le réveiller. Je ne suis pas roi de la discrétion.
Noir intérieur et bleu d'encre, mêlés. Osmose de circonstance. Vous suivez ?
Vous est-il déjà arrivé de tourner en rond quelque part, de passer trois fois devant un objet sans le voir réellement ?
À devenir fou.
À s’arracher la tignasse !
J’insiste. Rappel… Espoir !
Être un lion qui perd sa crinière dans une cage et tourner en rond, ce n’est pas vraiment ma tasse de thé. Je sais, drôle d’image.
Que voulez-vous : I’m a french lion. Not english.
L’inspecteur Holmes et le Docteur Watson [2]doivent bien se moquer de moi.
Sans loupe, à moitié fou. La pièce sens dessus dessous. Et sous mon nez, un manuscrit qui commence à bâiller. Il va se rendormir, dans son tiroir plein de poussière.
Saint Antoine de Padoue,
Ne fais plus la moue,
Je vais te contacter.
De la terre au Ciel,
Il n'y a qu'un pas immatériel.
Si tu entends prier :
C'est moi !
Pendant ce temps, un manuscrit aux archives se meurt d'ennui.
Et, le mien fait grise mine, ses pages ont jauni d'oubli. Il ne s’est même pas plaint. Quelle sagesse ! Déjà, il me fascine.
J'ai la mémoire qui flanche[3], j’me souviens plus très bien…
Jeanne me trotte inlassablement dans la tête, sans gêne. Elle m’agace royalement. Elle s’invite décidément de trop dans mon esprit, aujourd’hui. Elle va finir par me rendre complètement dingue. Ou, je le suis déjà. Va savoir ! Je lui en veux.
Le soleil tenace a vampirisé le tiroir. Il ne fait plus tout noir. Mon manuscrit se voit rayer comme un Dalton.
Il s'étonne !
Et pourtant il y a belle lurette qu’il séjourne dans son cachot de fortune. Normal.
Et l’ennui était là. Toujours. Encore. Si, pesant. Quotidien de cellule. Dommage, il n’avait pas de pattes pour tourner en rond. Il ne connaissait que l’étirement en long, mais restreint à sa condition de bagnard d’un autre âge.
Et les mots ne furent pas de bons compagnons. Muets comme des carpes dans une rivière bien sèche. Trop ancrés.
Pas un pet de vent, ni une brise, ni un souffle, même pas un zeste de filet de souffle. Étouffant !
Les pages siamoises trouvaient le temps bien long. Les liens d’encre ont leur limite. Se voir trop souvent, toujours les mêmes mots, on finit par se lasser. Le dialogue se rompt. Inévitable.
On les aurait crues comateuses. Elles rêvaient d’un bon coup net de bistouri pour se libérer. Elles auraient tourné la page… Probablement.
Jusqu’à la fin de peine.
De l’ombre à la lumière…
Ouverture !
Qu'a-t-il pu voler ?
Si ce n'est des mots.
Qui l’a condamné
aux galères Lectio[4] ?
Odeur prégnante de vieux papier. Est-ce l'Antoine ou ma mémoire qui m'a mis sur la piste. J’ai soudain un terrible doute, mais je me garde même de trop y réfléchir. Il pourrait bien m’en vouloir, l’Antoine.
Tel un chien, je renifle.
Papier ou t
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