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Du pain et des rolls

Du pain et des rolls

Published Feb 5, 2021 Updated Feb 5, 2021 Culture
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Du pain et des rolls

Les grosses rolls qui luisent au soleil comme sous les réverbères, rutilantes ; en sortent des soi - disant dames en bas résilles, accrochées au bras d’un costard cravate flambant neuf, la bouche cerise, l’œil très souligné, la démarche trop mouvante et lascive du serpent.
Le groom sérieux, l’œil pourtant légèrement en vrille de la vue stratagème du file-moi du blé et je te fais la totale mon chéri, s’incline dans un respect de job puis ouvre la porte vitrée, encadrée d’or fin comme une toile de grand maître.

On ne verra que si on y à l’ œil vigilant et non détourné de raison, le bas filé derrière le mollet, le talon usé et on sentira alors trop la cocotte dans un tournis de tête, vaseux.


Un temps, un luxe, un espace clos, une chambre et un lit même pas défait. A quoi bon ! Les billets qui sentent le sexe sur la table de nuit. Les jambes croisées qui se décroisent, s’écartent puis s’enroulent... Des respirations poussives qui mènent au sommet  et s’évanouissent comme de la brume. Puis, le costard cravate, allégé, qui part comme un dandy, sourire large.
La nuit se teinte des premières lueurs de l’aube. Les ombres trop noires fuient. Les étoiles s’éteignent... Les chats reprennent des couleurs et miaulent leur surprise. Les rolls rutilantes s’en vont dans l’avenue encore déserte. Les dames se rajustent, un instant l’envie de se rouler sur les billets. Une traînée laissée derrière elle d’un parfum de fausse bourgeoise, trop fort. Le groom silencieux, au pas de danse, léger et mécanique. La porte vitrée s’ouvre avec élégance, manquait plus que le tapis rouge des stars. Une bouffée d’air glacé gifle ces dames qui s’enveloppent de leur fourrure synthétique jusqu’au menton. Les talons claquent dans l’avenue, un peu pressés.
Le soleil se lève derrière les bâtisses grises. Déjà des rayons qui se frottent aux enseignes et aux baies vitrées. La gazette comme un courant d’air est déposé vite fait sur les seuils de portes closes, papier sentant l’encre, buvant l’humidité matinale. Puis, la ville s’anime de mille feux et couleurs, les bruits se glissent et rompent le silence. Un passant. Puis deux. Une porte s’ouvre. Un volet d’acier se lève sur une vitrine alléchante. Mannequins en collection intime, tout sourire figé, l’œil vague. Et le jeu de domino qui se livre à son rythme, minutes et secondes englouties pour laisser paraître la ville et ses merveilles du jour. Les boutiques égayent la grisaille tout en se demandant laquelle d’entre elles est la plus belle. Jeux de miroirs dans les reflets de vitres, jeux de dupes. Du rêve plein les yeux pour des passants heureux ou malheureux, tête relevée ou baissée, œil curieux ou morne... Un trompe-l’œil sans peinture.

Le jour. Soleil qui effleure la terre de ses premiers rayons encore tremblants comme une pieuvre qui touche un nouveau-né corail. La clé dans la serrure à peine livre un chuchotement. La porte s’ouvre, un peu grinçante, baignant un instant le corridor d’une lueur pâle. Puis, la pénombre s’étale de nouveau dans son élégance silencieuse, à peine déchirée d’un petit clac de talons de pointe de pieds. Les fourrures s’animent un instant encore, comme des animaux d’intérieur, paresseux puis, se posent à côté d’un chapeau élégant, sur un porte-manteau en bois lisse. Une à une les pièces s’illuminent. Les volets s’ouvrent laissant la lumière prendre son droit.
A la salle de bains, des visages sans sourire aux bouches cerise, yeux soulignés noirs, perdent leur éclat de nuit sous des cotons blancs qui peu à peu se souillent de couleurs. L’artifice tombe. Presque un renouvellement de virginité retrouvée, elles sont pelotonnées un instant dans une robe de chambre douce. Le temps d’un essayage de circonstance et bonne figure.
Dans la cuisine, siffle une bouilloire. Sur une table à la nappe cirée, du pain tranché, encore chaud, senteur de chocolat chaud, beurre et confitures.... Le petit déjeuner s’apprête alors que les petits dormeurs sont encore sous la couette. Des billets sont cachés dans un joli pot en terre cuite. Des mamans ayant retrouvées leur cuisine, une lessive tourne dans le tambour déjà écumé de mousse contre le hublot rond. Contre la vitre, jupes, soutien-gorges et fourrures... Dans le sac de poubelle, des bas résilles souillés de yaourt blanc, d’épluchures, de plastiques...

Des mamans, des baisers doux sur la joue. Des petits dormeurs qui commencent à s’éveiller. Étirements de chat, longs et tendres. Les paupières encore lourdes de sommeil. Joues rosies à point.

-On se lève, petit dormeur...

-Maman ?

Et un autre baiser de joue à bouche. Sourires... Lever. Rires et cris de joie. Çà sent bon à la cuisine... Une vie. 

 

L.G.

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