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Plume au vent

Plume au vent

Published Jul 31, 2025 Updated Jul 31, 2025 Biography
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Plume au vent


Il y a 5 ans, je rencontrais une envaHideuse.

Résumé par Le dernier mot, Real Fiction production ( animation made in home ) https://youtu.be/GRTySJV2Oao


Tout n'a pas été négatif durant cette période. J'ai pu sublimer cette épreuve par la création, à travers plusieurs médias déposés à l'époque sur un blog qui n'existe plus : Lullabybyebye. Oui, j'avais donné le petit nom de LullaBy à ma tumeur.







Grâce aux réseaux, j'ai eu le soutien à distance de mes proches : nous étions tous rattrapé.e.s par la queue du mickey de la Covid, je ne pouvais prétendre à plus. Les mois étaient ponctués aussi de gentils cadeaux qui m'arrivaient par la Poste.


Le quotidien des soins, par contre, je l'ai vécu seule. Comptant heureusement avant ou après sur Sylvie, ma super VSL. Mon ami Philippe, magnétiseur. Marina et Daphné, mes rendez-vous en médecine parallèle. Iels étaient mes béquilles sur lesquelles m'appuyer quand ma volonté flanchait.


Et j'étais bien entourée. D'amour ? Je ne sais plus bien. "Il" m'a dit janvier 23, entre autre pour éviter de remettre en question ses actions, que s'il n'y avait pas eu le cancer, il m'aurait sans doute quittée avant ... Ce à quoi, j'avais répondu : " Ah mais, merci le cancer, alors ! "


Comme à son habitude, durant ces mois-là, il a été remarquable dans la logistique de notre vie. S’est rendu disponible, en ne partant plus en déplacements. Je n'avais plus qu'à survivre et faire un peu d'école à la maison pour notre petit dernier. Car on avait pris la mesure de confiner les enfants trois mois de plus pour leur éviter la culpabilité de me contaminer alors que mon immunité était au plus bas. Sa mère, prof, était venue à domicile aider nos fils.


J'ai eu aussi de touchantes attentions plus inattendues :


> Un shooting bénévole, organisé en urgence la veille de la première chimio, grâce à Alexander, mon thérapeute à l'époque, également photographe. Sophie, coiffeuse et Cindy, maquilleuse avaient généreusement répondu à son appel.


> Un challenge afin de coiffer Princesse Cycyborg - personnage que j'avais inventé alors que j’étais chauve - par Chloé, et suivi par sa soeur Alice. Nous sommes toujours en lien.


> Une illustration spontanée inspirée d’un autre de mes poèmes, de Marie Théis, tatoueuse.



Photos : Alexander Chassignol.




Pourquoi je raconte ça ? Cette année, en pleine panique de "personne ne voudra embaucher une ancienne cancéreuse", j'ai tout fait pour enterrer les traces de cette période de ma vie. Je l'ai vécu comme si j'amputais une part de moi, comme l'héroïne qui se ronge la main pour ne pas rester piégée. J’avais vraiment très peur que cela fasse trop dans ma liste de points négatifs, face à un recrutement.



Mais ces jours-ci, 5 ans plus tard donc, d'une part, je suis seule pour célébrer le fait que les années ont mis à distance les probabilités de récidive.

C’est une spécificité du triple négatif ( agressif ) : vous avez droit à un traitement de cheval parce que vous ne pourrez bénéficier de rien d'autre après. On ne sait pas pourquoi il est là, celui-là. On sait juste l'exterminer quand il est encore temps, mais pas prévenir les rechutes.

Heureusement, plus les années passent et plus vous pouvez estimer la menace estompée. Paraît donc, d’après les statistiques, que je suis sauvée. ( De ça, en tout cas ... )

Et d'après les cadres légaux capitalistes, je vais même pouvoir envisager désormais emprunter !



Cette période sur le fil d'une seule pensée « il faut tenir » était anxiogène. Ereintante. Et elle m’a laissé des séquelles. Mais elle n’était pas triste. Je ne vivais pas le cancer comme une injustice. Me lamenter n’aurait servi à rien. Je ne méritais pas de mourir, point. Je faisais ce que j’avais à faire pour ne pas « m’abandonner ».



Avoir été trahie puis abandonnée soudainement, fin décembre 2022, a été autrement plus violent et destructeur. Tout ce en quoi je croyais a été emporté dans un chagrin diluvien et un torrent de boue.

La douleur a creusé en moi un lit d’été : la crue a cessé, mais un filet de chagrin y coule une vie souterraine. Je ne le pleure plus, « lui », mais tout ce qu’il a brisé en moi.

Je recolle les morceaux. Comme l’écrit avec ironie Baptiste Beaulieu :


« Ce qui ne nous tue pas nous brise en mille morceaux. Alors oui c’est joli la mosaïque, mais c’est long à assembler. »


Et surtout, surtout : c’est long, usant et ça fragilise !



D'autre part, après une année à me battre pour obtenir une certification d’auxiliaire de bibliothèque parce qu’en tant que maman au foyer, et malgré des diplômes d’études supérieures, je n’existe plus sur le marché de l’emploi depuis une éternité, je l’ai obtenue mention très bien ! Je dis « me battre » parce qu’aux vacances de février, face à une masse d’épreuves supplémentaires et une charge mentale ingérable, mon cerveau s’est paralysé. J’ai vraiment cru devoir abandonner cette reconversion pour ne pas sombrer complètement.


Et ce matin, voilà-t-y pas que je reçois un texto improbable comme un rappel à l’ordre de « ne prends pas tes rêves pour la réalité ! » : une notification de France Travail pour des offres d’emplois en tant qu’aides-ménagères ! Je n’ai rien contre, si ce n’est un corps douloureux qui me fait comprendre tous les jours qu’il fatigue et qu’il ne pourra plus assumer un travail physique répétitif. Je ne suis plus la jeune femme des photos de septembre 2020 : celle qui possédait tant de forces !


On notera que ces emplois d’aide à la personne, proposés en majorité aux femmes, les assignent une fois encore à retourner au sein des foyers et « à prendre soins de … » Oui là, on va me rétorquer qu’il y a des hommes aussi. Oui. Peu. Mais pour le coup, aussi mal payés pour des boulots sous-estimés : le lien aux personnes.


J’ose aspirer à faire autre chose que du care, parce que c’est ce que j’ai fait toute ma vie dans ma sphère personnelle - en accord avec mes valeurs - mais au final, pour ne jamais en être valorisée et même repartir plus pauvre !

Pour autant, je n’écarte pas cette possibilité … Qui suis-je pour croire en avoir le choix ?





Alors me souvenir d'elle, de celle qui est restée debout, cela me permet d'être un peu fière de moi. Je ne veux plus la cacher. Je ne veux plus me cacher.


Et aussi, je viens écrire pour tenter de distancer l’insécurité de mon avenir précaire. Déposer, démêler, compartimenter, assécher un peu les algues de pensées dans lesquelles je m’enchevêtre.


Le blog n’existe plus, pourtant il y aurait encore tant à témoigner de l’après.

Car tout est lié : cette hécatombe et celle qui a suivi. Mon psy m’avait dit embêté pour moi face à au choix de mon époux : « Vous savez, Aline, la maladie pour beaucoup, ce n’est pas glamour … »


Mes prises de conscience aussi en découlent. Mes revendications féministes qui dérangent même parfois mes proches. Pourtant, je peux tout décortiquer du pourquoi j’en suis là, comme tant d’autres femmes.


Et ce qui me torture le plus, c’est qu’en plus j’ai été consentante sur tout …





Pour m’exhorter à tenir bon, j'entends : « Oui, mais tu n'as pas tout perdu : tu as tes enfants ».

Hérésie ! Car souvent ils ne sont pas là, justement, quand toute cette agitation à se débattre n’a plus de sens. A peine lors des moments familiaux de connivences. Pas forcément aux anniversaires. Juste un Noël sur deux ...

Ils ne veulent même plus m’accompagner aux feux d’artifice.

Et en vrai, c’est tant mieux pour eux. Leur indépendance est souhaitable et légitime. Car ce n’est pas leur rôle, ni leur destinée.



J'entends aussi : « Bats-toi pour toi. Tu le mérites. » Je l’ai fais. En tant d’occasions.


Mais j’ai appris que si les gens tombent, ce n’est jamais par manque de volonté mais parce que le monde dans lequel on vit les pousse et repousse à terre dès qu’ils se relèvent.
Il est des machines institutionalisées desquelles il est quasi-impossible de ne pas ressortir broyé.e.s.




J'en suis là. Je regarde le monde.

Tant de personnes qui se débattent face à un enfer bien pire que ma situation …

Je culpabilise dans ma villégiature au soleil.


Et puis … je suis en train de chercher un morceau de Santana dont je ne me souviens plus du nom. Je fais défiler les titres et m’arrête sur une collaboration avec Joe Coker que je ne connais pas : Little Wing. Et pile à ce moment-là, la tramontane, qui m’use prodigieusement les nerfs, glisse comme par magie par l’interstice de la baie-vitrée que je garde quand même un peu ouverte pour aérer, une plume !




Et il y a eu à nouveau ce truc en moi : ce truc d’enfant qui permet de bricoler un monde intérieur plus beau que celui du dehors, qui m'a poussé spontanément à m’exclamer et sourire.


Je n’arrive plus à lire dans ces synchronicités un signe de meilleur à venir. Mais j’ai ressenti l’étincelle espiègle du moment.


Alors, si je ne suis rien dans ce monde où personne ne me demande mon avis, si je ne sais toujours pas où je vais, il semblerait du moins que je sois encore de ces individus capables d’accueillir une plume au vent comme une consolation.





B.O. : https://youtu.be/7KzkCqi94Gs?si=3uR3rE9vqkzmv3e9


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