Félicitations ! Ton soutien à bien été envoyé à l’auteur
Connerie de virus

Connerie de virus

Publié le 6 mai 2020 Mis à jour le 29 sept. 2020 Santé
time 8 min
1
J'adore
0
Solidaire
0
Waouh
thumb 0 commentaire
lecture 111 lectures
1
réaction

Sur Panodyssey, tu peux lire 30 publications par mois sans être connecté. Profite encore de 29 articles à découvrir ce mois-ci.

Pour ne pas être limité, connecte-toi ou créé un compte en cliquant ci-dessous, c’est gratuit ! Se connecter

Connerie de virus

Le virus qui nous rend la vie si difficile…

 

… il va bien falloir qu’on apprenne à vivre avec, qu’on essaie de reprendre nos libertés. Ce que ça va nous coûter, en termes de vies, de soins, de flips raisonnés et irraisonnés, on ne peut pas le savoir avant d’avoir essayé.

Il va donc bien falloir apprendre, aussi, à mourir avec : des pertes humaines, il y en aura encore. On nous promet un vaccin à la fin de l’année, ce qui veut dire plus de six mois encore avant de pouvoir nous faire traiter – sans compter le temps nécessaire pour bâtir nos immunités.

En fait, il semble que le délai annoncé soit moins dû à la mise au point du vaccin lui-même, qu’aux chaînes de production exsangues dont nous disposons ; nous n’étions pas préparés pour encaisser cette calamité.

 

Même si nous savons faire face à la grippe saisonnière, même si nous savons comment glaner le matériau nécessaire à mettre au point le produit habituellement proposé à la fin de l’automne, cette souche-là nous a pris de court, par sa violence et les hasards des constitutions. Des pistes étranges se dessinent : certes, les personnes déjà fragiles sont extrêmement exposées aux complications pulmonaires… mais pas systématiquement… et curieusement, les personnes de groupe sanguin 0+ semblent plus souvent résistantes à l’attaque, par exemple. Et des adultes en pleine santé apparente en sont morts.

Il y a de quoi avoir peur, dans ces conditions.

 

Depuis des années, je me dérobe à la vaccination contre la grippe. En 2004 je crois, j’ai eu la chance de contracter l’influenza qui circulait. Il avait tellement viré entretemps, ce virus, que les vaccins mis au point restaient inopérants.

Je suis montée à 42°, je me souviens d’avoir été dans un état dépassant la symptomatologie habituelle ; ça s’est traduit par un état voisin des convulsions fébriles chez un enfant.

J’étais agitée, limite délirante : au plus fort de la fièvre, bien loin d’être abattue, je me souviens d’avoir péroré une soirée entière, déblatérant un monceau de conneries, assise en tailleur sur mon lit, devant une amie qui avait bravé toute prudence pour venir soigner un chagrin d’amour, tellement elle avait besoin de parler. Consolation : mon discours à éléphants roses l’avait fait hurler de rire à taper sur les coussins… et je m’étais bien défoulée, pour ma part.

A coup de gins orange bien tassés, on avait cuvé toutes les deux notre état respectif, à trois mètres l’une de l’autre – elle sur mon canapé, moi dans mon plumard, dans mon pyjama de coton complètement détrempé. Elle n’avait même pas attrapé la maladie, et j’ai plus craint pour sa sécurité de la voir repartir en voiture, beurrée comme un p’tit lu !

 

De mon côté, cette grippe-là m’a comme immunisée contre les virus suivants : je n’ai jamais réussi ensuite à faire plus de deux jours de vagues courbatures accompagnées d’un modeste 38,2, et ça dure depuis 15 ans. Une seule fois je me suis laissée vacciner, et comme je devais avoir croisé la souche au mauvais moment, j’ai eu droit à ma grippette quand même… Un coup dans l’eau, donc.

 

Je m’interroge quand même sur le fait que nulle précaution n’a été recommandée, par exemple, concernant des véhicules de contamination évidents ; les distributeurs de liquidités et les sabots de paiement dans les rares commerces restés ouverts, alors que cette petite saleté survit jusqu’à 12 heures sur le métal, tiens, en voilà des réservoirs à saloperies ! Je ne pitonne jamais sur ces claviers sans me désinfecter les mains ensuite avec mon propre produit, et j’en ai même proposé à des gens qui me suivaient – l’un d’eux est devenu tout pâle en réalisant le danger.

Et même dans les magasins comportant des postes de désinfection, je me méfie des distributeurs sur lesquels tout un chacun vient collecter ce que les précédents clients viennent d’y déposer : il suffit d’une désinfection aléatoire (et les gestes à faire sont loin d’être acquis pour tous…) pour s’assurer de repartir avec de quoi diffuser plus loin le danger invisible.

 

Même les plexiglas installés aux caisses peuvent rester inopérants : combien de fois j’ai vu des gens se parler bien dans l’axe… sans plexiglas, et à moins d’un mètre.

Et dans le géant orange de mon quartier, je n’ai remarqué le poste de désinfection des chariots que par hasard. Et le vigile posté à l’entrée ne captait pas l’importance de le faire remarquer aux clients !

 

Elle est bien là aussi, la confusion entre la distance à respecter pour éviter de se toucher d’une part (un mètre), et d’autre part celle pour ne pas se postillonner dessus (2 mètres minimum). Et après avoir joué au petit flic quelques jours, forte de mon diplôme d’infirmière qui connaît bien les précautions à prendre, j’ai renoncé : j’ai été insultée par un quidam à fleur de nerfs (« Men-teuse, menteuse ! MAIN-AIN-AINTEUSE ! »), alors pour la santé sociale de ma communication et de mes relations, j’ai décidé de fermer mon clapet. Un de mes voisins ne me parle plus depuis quelques semaines, après que je lui aie fait remarquer que dans cette cage d’escaliers, on était trop près pour qu’il m’adresse la parole…

 

Bref, le dégât de proximité se cache là où on ne l’attendait pas.

 

A côté de ça, désœuvrée comme la plupart, j’ai fini par trouver un petit bénévolat à accomplir : ma coiffeuse a repris ses activités le 27 avril, j’étais sa toute première cliente – donc aux premières loges pour constater la cadence effrénée des appels pour prendre rendez-vous. Elle et son collègue devaient s’interrompre toutes les 5’, montre en main, pour aller répondre au bigophone – super-coton quand on est en train d’appliquer une couleur ou une décoloration, il faut enlever les gants, puis les remettre… le temps que la sonnerie retentisse à nouveau.

Et en l’entendant réfléchir à haute voix, se demandant comment elle allait faire le lendemain sachant qu’elle serait seule, je me suis proposée pour venir la seconder quelques semaines, le temps que son apprentie ait le droit de revenir.

Donc les mardis, je monte au salon de 9 00 à 18 00, avec mon petit frichti de midi et ma boutanche de boisson isotonique, les journaux et mon portable… je balaie les cheveux, je rince le matériel, je désinfecte les chariots et les instruments, les divers postes par lesquels passe tout client (jusqu’à 3 différents…), je réponds au téléphone et je prends les rendez-vous. Je lui déballe son matériel (masques, désinfectant, peignoirs en plastique), je lui organise son petit sas de désinfection à l’entrée, je fais les cafés… et je rentre complètement vannée ! Le premier jour, je suis rentrée avec un beau pansement sur un doigt qui avait croisé la route de son coupe-chou, semant des gouttes de sang un peu partout.

 

Sans oublier de réexpliquer patiemment aux récalcitrants au masque pourquoi il faut qu’ils en mettent un, même s’ils tournent le dos à la coiffeuse : parler signifie crachouiller sur le miroir et la tablette, donc infester une surface qu’il va falloir nettoyer ensuite.

Le diable se cache dans les détails ! Qui pense à se désinfecter les mains en sortant du bus, alors qu’il vient de se cramponner aux barres et de demander l’arrêt par pression sur le bouton idoine ?

 

 

A part ça, je médite de proposer à un amoureux de braver le spectre de la contamination : lui confiné, moi confinée, comment pourrions-nous nous refiler quoi que ce soit ? Il me confie être au bord de l’explosion, et moi, de frustration, je fume comme un sapeur, alors que je venais de décider de me sevrer en consultation de tabacologie (il se trouve que ma peau ne supporte pas la colle des patches, et que les divers bonbons et chewing-gums à disposition m’écœurent terriblement).

 

Bref, le problème de santé est bien plus large et retors que le simple (!) fait de risquer de tomber malade.

Sans parler de l’économie : un millier de chômeurs en plus, des jeunes entreprises qui périclitent à peine montées ou tout juste à flot. Les seuls qui s’en sortent sont les pharmacies, les e-commerçants, les deliveries de bouffe, les take-away (NB : il ne sert à rien de faire tremper pièces de monnaie et billets dans des plateaux de service remplis de désinfectant POUR LES MAINS, car c’est du produit de désinfection pour les objets et les surfaces qu’il faut utiliser… pour excellente qu’est l’idée, ça nous a laissées songeuses, avec la copine infirmière venue partager un pot et un burger au bord du lac l’autre jour. L’argent liquide n’aura jamais si bien mérité son nom !)

 

Il est temps de prendre notre courage à deux mains (désinfectées), et d’affronter la psychose ambiante.

 

Tentons le coup, mettons-nous face au vent, ça ne peut plus durer ainsi.

 

 

lecture 111 lectures
thumb 0 commentaire
1
réaction

Commentaire (0)

Tu aimes les publications Panodyssey ?
Soutiens leurs auteurs indépendants !

Prolonger le voyage dans l'univers Santé
Giclée
Giclée

Un mot d'un dictionnaire, ma définition, vôtre sourire, ma joie.

Bernard Ducosson
1 min

donate Tu peux soutenir les auteurs qui te tiennent à coeur