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Terres rares : la nouvelle guerre froide des métaux - par Karl-Alexandre Pinot, Président de l'Alliance

Terres rares : la nouvelle guerre froide des métaux - par Karl-Alexandre Pinot, Président de l'Alliance

Publié le 21 oct. 2025 Mis à jour le 21 oct. 2025 Politique
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Terres rares : la nouvelle guerre froide des métaux - par Karl-Alexandre Pinot, Président de l'Alliance

Les grandes puissances ne se disputent plus seulement des territoires, mais des atomes. Dans le monde contemporain, la géopolitique passe par le tableau périodique. Derrière chaque smartphone, moteur électrique ou missile de précision se cache une poignée de métaux aux noms mystérieux : néodyme, dysprosium, gallium, terbium. Ces « terres rares » sont la clef de voûte de la transition technologique et militaire du XXIᵉ siècle.


Or, un pays détient l’essentiel de leur raffinage : la Chine.


Une dépendance mondiale sous contrôle chinois


Depuis vingt ans, Pékin a méthodiquement tissé une hégémonie minérale. Si d’autres pays possèdent des gisements comme l'Australie, les États-Unis, le Canada, l'Afrique du Sud, la Chine a investi dans la partie invisible de la chaîne, la plus stratégique : la transformation chimique et métallurgique.


Résultat : aujourd’hui, près de 90 % du raffinage mondial des terres rares se fait en Chine, tout comme la quasi-totalité de la fabrication d’aimants permanents utilisés dans les moteurs électriques et les systèmes de guidage.


Cette position confère à Pékin une arme silencieuse : celle de l’approvisionnement. À chaque tension diplomatique, la menace d’un embargo plane. Déjà en 2010, la Chine avait coupé les exportations vers le Japon après un différend maritime. Depuis, les Occidentaux savent qu’ils dépendent d’une monopole stratégique, comparable au pétrole saoudien dans les années 1970.


Washington et Canberra resserrent leurs rangs


Conscients du danger, les États-Unis et l’Australie ont décidé de passer à l’offensive. Le 20 octobre 2025, les deux pays ont signé un accord majeur sur les “minéraux critiques”, visant à bâtir une chaîne d’approvisionnement indépendante du géant chinois.


Ce pacte, doté d’un financement initial de plusieurs milliards de dollars, prévoit la création de nouvelles capacités d’extraction, de raffinage et de production d’alliages sur le sol australien, avec un appui industriel et technologique US. L’idée est simple : transformer sur place plutôt que d’expédier le minerai en Chine.


Les premiers projets identifiés concernent notamment le néodyme-praséodyme (utilisé dans les aimants de véhicules électriques) et le gallium, indispensable à l’électronique de défense et aux semi-conducteurs. À terme, l’alliance vise à former une sorte d’OTAN minérale, capable de sécuriser les métaux critiques entre pays alliés.


Une bataille industrielle avant d’être géologique


Mais que l’on ne s’y trompe pas : ouvrir une mine ne suffit pas. L’extraction n’est que la partie émergée de l’iceberg. La vraie bataille se joue dans ce qu’on appelle le “midstream”, c’est-à-dire les étapes de transformation, de séparation chimique, de frittage et d’alliage.


Or, ces étapes nécessitent un savoir-faire complexe, coûteux et souvent polluant, que la Chine a accepté d’assumer quand l’Occident l’a délocalisé dans les années 1990.


Reconstituer cette chaîne prendra du temps et des milliards. Les projets australiens comme Arafura ou Lynas avancent, mais aucun ne peut encore rivaliser avec les mastodontes chinois comme Baotou ou China Northern Rare Earth.


L’accord USA–Australie n’est donc pas une rupture immédiate, mais une reconstruction lente d’une souveraineté industrielle perdue depuis trente ans.


Ce bras de fer dépasse la seule question des mines. Il marque le retour de la politique industrielle comme instrument de puissance. Les États-Unis, jadis apôtres du libre-échange, redécouvrent le protectionnisme stratégique : subventions massives, achats publics, clauses de contenu local. L’Australie, elle, devient l’avant-poste minéral du monde libre : un “bouclier minier” entre l’Occident et la Chine.


Derrière ces alliances, une idée simple : le XXIᵉ siècle sera dominé par ceux qui contrôlent les métaux du futur, comme le XXᵉ l’a été par ceux qui contrôlaient le pétrole.


Vers un nouvel équilibre mondial ?


La domination chinoise ne s’effondrera pas du jour au lendemain. Pékin garde une avance industrielle et logistique considérable, et l’Occident reste dépendant pour ses chaînes d’aimants, de batteries et de semi-conducteurs. Mais l’accord USA–Australie ouvre une brèche : celle d’un monde multipolaire des matières premières, où la dépendance à la Chine n’est plus une fatalité.


C’est une guerre sans bataille, mais pas sans enjeu. Dans le grand jeu des ressources, les métaux sont les nouvelles armes, et les mines les nouveaux champs de bataille. Le pays qui maîtrisera la chimie des terres rares tiendra, demain, la clé de la souveraineté technologique mondiale.


Karl-Alexandre Pinot,

Président de l'Alliance

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Commentaire (1)

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Thierry verif

Thierry Curty il y a 7 heures

Ca c'est parce qu'on le veut bien, mais c'est idiot. Au lieu de nous acharner sur ces ressources des technologies obsolètes du 20e siècle, nous ferions bien mieux d'exploiter le filon (sans jeu de mot) pour développer les technologies du 21e siècle et ainsi concurrencer les chinois en maintenant notre avance.

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