Félicitations ! Ton soutien à bien été envoyé à l’auteur
avatar
16 Retour des Indes

16 Retour des Indes

Publié le 15 sept. 2025 Mis à jour le 15 sept. 2025 Historique
time 3 min
0
J'adore
0
Solidaire
0
Waouh
thumb 0 commentaire
lecture 2 lectures
0
réaction

Sur Panodyssey, tu peux lire 10 publications par mois sans être connecté. Profite encore de 3 articles à découvrir ce mois-ci.

Pour ne pas être limité, connecte-toi ou créé un compte en cliquant ci-dessous, c’est gratuit ! Se connecter

16 Retour des Indes

Sa femme le jugeait « absolument navrant », mais mon cousin était resté ferme. Chaque jour, il rentrait chez lui à dos de chameau.

Il avait ramené la bête d’un voyage aux Indes et s’en était entiché. Il trouvait « très chic et parfaitement adapté » ce moyen de transport.

Bien sûr, au début, il y eut des quolibets, des blagues un peu puériles sur l’homme et sa monture. Il résista et, de fil en aiguille, ce qui ne paraissait au départ qu’un défi aux bonnes mœurs finit par remonter les pentes de la séduction.

On le saluait dans la rue et lui répondait par un petit signe du chapeau. Son chameau impassible ne s’en laissait pas conter. Il s’était pris d’affection pour l’homme mais conservait sa distance envers les étrangers. Avec mon cousin c’était très différent.

Ils avaient de temps en temps des signes de tendresse et même des moments d’intimité où ils semblaient se parler en secret. Les deux étaient fiers mais ils s’attendrirent mutuellement par leurs promenades quotidiennes, par des frottements de poils, et aussi, parfois, par de longues remontées de langue râpeuse.

L’homme et la bête s’effaçaient dans ce rapprochement, comme si la connivence faisait disparaître les frontières. Il n’y eut pas de transformation mais un long glissement de l’un vers l’autre.

Le chameau prit les attitudes de son maître. Il n’était pas rare qu’il s’inclinât légèrement devant les demoiselles ou qu’il passât, hautain, devant les commerçants. Mon cousin, lui, s’exprimait parfois en montrant ses dents. En des occasions plus rares, on l’entendit blatérer très distinctement à l’adresse des passants.

L’homme et sa monture semblaient à l’unisson, et on ne savait plus très bien comment les séparer. Les Aztèques en leur temps ne distinguaient pas non plus celui qui montait l’autre.

Des années plus tard, tous les deux disparus, je rencontrai son épouse. Elle eut un sourire navré à l’évocation de leur couple : « Je ne dirais pas qu’il m’a trompée, mais je ne peux m’empêcher de croire que j’étais bien la seconde dans ses pensées. »

Cet aveu en demi-teinte me rappela un détail que j’avais oublié. Le chameau n’avait jamais été nommé. À ma question de l’époque, mon cousin avait répliqué sèchement : «On ne nomme pas les proximités. »

Je m’interroge encore sur le sens caché de cette affirmation.

******************************************************************************************************************************

Source : http://nepantla.net/L_C_23.html

Image : gallica.bnf.fr

lecture 2 lectures
thumb 0 commentaire
0
réaction

Commentaire (0)

Tu dois être connecté pour pouvoir commenter Se connecter

Tu aimes les publications Panodyssey ?
Soutiens leurs auteurs indépendants !

Prolonger le voyage dans l'univers Historique
16 La caza
16 La caza

La caza había sido buena, había...

Christophe De Beauvais
3 min
17 La chasse
17 La chasse

La chasse avait été bonne, on a...

Christophe De Beauvais
3 min
13 El retrato
13 El retrato

Hay algo áspero en su postura q...

Christophe De Beauvais
2 min

donate Tu peux soutenir les auteurs qui te tiennent à coeur

promo

Télécharge l'application mobile Panodyssey