Chapitre 9 : Alerte !

La journée vient à peine de commencer que le groupe des résistants est déjà réuni

dans l’atelier de l’Orfèvre. Depuis les menaces de Cabos, le Général Cocker fait de

son mieux pour ne pas trop attirer l’attention quand il organise un rassemblement.

C’est toujours lui qui préside ce genre de réunion secrète. La tête haute, il s’adresse

à ses alliés, plus nombreux qu’auparavant :

– Je remercie tout d’abord nos nouvelles recrues. Chers Bazookaniches et chers

sabradors, bienvenue parmi nous ! (Les intéressés se font applaudir.) Je vous ai tous

rassemblés pour résumer la situation actuelle. En ce jour, notre groupe compte

exactement seize membres. Seize Canins indignés face à l’inaction de la Révoltruffe.

Seize Canins bien décidés à protéger Ethélys de Férus et de ses sbires. Seize Canins

qui rêvent d’un monde pacifique. Nous sommes prêts à mener le Dernier combat

afin de stopper, ou au moins ralentir, notre ennemi Férus. Ce dernier est peut-être

déjà en route donc il est hors de question d’attendre que ses panthères nous laissent

enfin sortir de Spectror ! Quatre trappes relient notre base à la surface. Il va falloir

en choisir une et repousser les panthères qui s’y trouvent. Ainsi, nos aéro-niches

pourront partir à l’assaut.

Quelques applaudissements retentissent et soutiennent le discours du Général.

Ses yeux brillent d’espoir.

– Agir, voilà le mot d’ordre. Agir ! Ne pas rester là sans rien faire, comme le

voudrait l’Amiral Cabos. À ce sujet d’ailleurs, il est temps pour moi d’évoquer un

sujet important. S’il vous plait… (Le silence revient peu à peu.) Hier, j’ai rencontré

l’Amiral dans les couloirs de Spectror et ses propos m’ont glacé. Il m’a

officiellement annoncé que je serai puni pour avoir désobéi à ses ordres. Et ce, dès

ce soir. Au moment où je vous parle, il me reste une journée avant d’être jeté aux

panthères.

Le public est d’abord abasourdi. Puis quelques voix s’élèvent, des grognements

se font entendre. Lisa prend la parole :

– Vous agissez pour le bien d’Ethélys et Cabos veut vous condamner ? C’est

injuste ! On ne restera pas sans rien faire.

– Je vais lui dire deux mots, moi ! s’emporte Billy, qui respecte énormément le

Général Cocker. Non mais dis donc !

– Doucement, Billy…

Cocker est touché par ces réactions mais s’efforce de rester lucide :

– Nous allons profiter de cette opportunité pour passer à l’étape suivante :

s’échapper de Spectror et mener le Dernier combat.

– Dès ce soir ? demande un sabrador. Ce ne serait pas un peu trop tôt ?

– Tout est prêt, intervient l’Orfèvre avec fierté. Les armes et les munitions sont

ici même ; seules les aéro-niches sont au hangar. Et nous avons suffisamment

d’expérience sur le champ de bataille pour improviser les stratégies d’attaque. J’en

profite pour vous annoncer, ainsi qu’à tous les sabradors, que j’ai élaboré de

nouveaux équipements qui vous sont entièrement dédiés ! (Le sourire jusqu’aux

oreilles, le teckel rapproche une caisse et en sort divers accessoires.) Voici des gants

et des masques capables de résister à l’épreuve du feu. Bien sûr, ne les soumettez

pas trop longtemps aux flammes car leur résistance a ses limites. Avec ceci, vous

pourrez affronter les panthères en prenant moins de risques !

Lisa et les huit autres sabradors s’emparent de leurs équipements et remercient

l’Orfèvre.

– Malheureusement, il y a une nouvelle peu réjouissante que je dois vous

partager… avertit le Général Cocker en fronçant les sourcils. L’Amiral Cabos avait

des informations très précises à propos de nos plans. Bien trop précises… Cela me

laisse penser qu’une taupe s’est cachée parmi nous.

La déclaration jette un froid dans l’atelier. Le silence est total. Tandis que le

regard perçant de Cocker parcourt lentement l’assemblée, une seule silhouette

semble mal à l’aise. Le Général se tourne dans sa direction et lui fait face.

Avant qu’il ne puisse prononcer le moindre mot, une alarme stridente se

déclenche. Les hauts parleurs situés dans les couloirs font un bruit insupportable

quelques secondes, puis la voix d’une sentinelle se fait entendre. L’Orfèvre ouvre la

porte et tout le monde écoute la voix de l’éclaireur, qui est en panique :

– Au nom de toutes les sentinelles de Spectror, j’informe la Révoltruffe d’un

danger imminent. Ecoutez-moi bien… Nous avons observé beaucoup de

mouvements du côté des panthères, ces dernières heures et… elles ont pris la

décision de passer à l’offensive ! Nos quatre trappes sont sauvagement attaquées

depuis peu de temps et … je crains que… Oh non ! On m’annonce à l’instant une

terrible nouvelle : la trappe Sud vient d’être détruite par les panthères ! Je répète, la

trappe Sud vient d’être détruite par les panthères !

Au sommet du Crogel, Falcon-Dog se réveille plus tôt que tout le monde et sort

du Temple. Le vent frais du matin lui caresse le visage. Il est en pleine forme et

s’apprête à reprendre l’entrainement. Falcon-Dog commence à maitriser le pouvoir

du vent mais il souhaite le perfectionner. En attendant qu’Anéma le rejoigne, il

s’assied sur un rocher et contemple le paysage. Il se tient sur le toit du monde, le

plus haut point d’Ethélys. Malgré les quelques nuages qui s’écrasent sur les

Montagnes de Glace, il est possible de voir tout Ethélys depuis cet endroit.

Falcon-Dog laisse son regard se promener dans le paysage et essaie de retrouver

la lointaine tâche verte qui correspond Hurle-Bois. Il l’avait aperçue en se rendant

au Temple pour la première fois. Aucune trace de la tâche cependant. À la place :

une zone sombre surmontée d’une immense colonne noire. Falcon-Dog se demande

ce que cela peut bien être… Tout-à-coup, il réalise qu’il s’agit d’une gigantesque

colonne de fumée qui semble vouloir dépasser le Crogel. « Impossible, se dit-il en

écarquillant les yeux. Ce ne serait pas le Hurle-Bois qui… oh non ! Il y a dû avoir

un incendie. Hmm… les feux de forêts sont bien trop rares, là-bas… À coup sûr, ce

sont les panthères de Férus qui ont tout incendié ! »

Paniqué, Falcon-Dog regarde autour de lui et aperçoit Elie. Il pousse un soupir

de soulagement en voyant l’Ancien, quelques mètres derrière la panthère des neiges,

qui marche dans sa direction. Le super-chien se précipite vers lui :

– Vous avez vu toute cette fumée ?! Le Hurle-Bois a été ravagé par les flammes !