

Michel Bertoux (troisième partie; 3/3)
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Michel Bertoux (troisième partie; 3/3)
Le miracle eut lieu en novembre. Voyant arriver dans le bureau de comptabilité le printemps, ses pétales de rosée ouverts sur l'éther d'une prairie, l'espoir d'une révolution, un mât de mai planté en plein cœur germa. Véronique Deremez intégrait le service.
Un nouveau soleil se levait. Il fallait faire place nette, revenir au monde, conjurer le sort et apparaître décrassé des couches de mal-être. Véronique. Comment pouvait-elle être séduite, par quel enchantement, quel élixir?
Être, ne rien vouloir de plus qu'être. Être vrai. Elle avait quelque chose de lumineux, d'essentiel. L'occasion était trop belle. Belle ou non, elle était trop rare, inespérée. Il décida contre les vents impétueux et les marées de honte de s'élever, de relever le défi, se prit en mains, rêva de lui demander la sienne.
Le corps s'use, le poids s'affirme, infirme. Le dos lâche, la souplesse s'amenuise, la vitalité diminue, la force se fonde sur la masse. Se pencher, se baisser, se relever deviennent des épreuves. L'adulte grisonnant s'assoie, les pieds enflent, la peau prend des teintes de souffrance lancinante.
Livré à ses addictions : cigares, rhum et jeux vidéos, ses faiblesses reprirent le commandement de sa vie. Lorsqu'on est plus qu' un fardeau, un parasite, on s'enclave dans la solitude, à l' écart. Le ressentiment vous égorge.
Michel Bertoux ruisselait d'un rêve sanglant ; éveillé, il se demanda qui avait été la victime ? Puis la nuit continua de sommeiller en lui, prisonnière. Il somnola, retomba dans d'autres rêves étriqués, un étau s'empara de sa poitrine. Le cauchemar électrisa son cœur. Sa gorge tenue en laisse, le bras écrasé, il tenta de s'échapper, voulut se lever. Des douleurs amplifiées dans les aiguës lui arrachèrent un cri intérieur, un râle. Il se figea sur le sol transpirant, à bout de souffle.
Lorsqu'il reprit ses esprits, les aiguilles l'envenimèrent telles des dards de frelons à travers l'étau. Il parvint à saisir son mobile. Le dialogue avec l' interlocuteur fut un supplice, il se traîna jusqu'à la porte, chercha un répit, une éclaircie, une respiration qui ne vint pas, abandonna son esprit. Toute pensée était hors d'atteinte. Survivre jusqu'aux secours et se laisser porter affreusement, jusqu'à d'autres réveils.
Parmi les origines de l'infarctus du myocarde, le diabète eut un rôle. Mais ce n'est pas tout. Un mois de scanners, d'IRM rythma sa vie jusqu'au verdict : insuffisance rénale terminale.
Le choix pour Michel Bertoux était simple: dialyse et son issue fatale ou transplantation. Cette greffe peut se réaliser par un donneur décédé ou vivant. Dans sa famille, personne ne put lui être utile et pour le donneur anonyme, Michel connaissait les règles. Il espéra cette greffe, mais comment espérer la mort de quelqu'un ?
Elle eut lieu pourtant.
Ce samedi soir, Michel Bertoux s'était donné rendez-vous avec lui-même, avec sa jeunesse aussi. Débarrassé de ses assuétudes. Pour son nouveau filtre, pour son sang purifié, il avait su. Elle était là, bien vivante, dans cette salle de sport où se pratiquaient les compétitions de badminton. Une raquette fougueuse à la main, entre slice et spin, entre lift et smash, il la voyait s'émerveillant, ému, de ce que la femme portait en elle de plus radieux que le désir. Rien ne semblait empêcher Isabelle Sanfourche de jouer pleinement sa partie.

