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Le 12 A 38

Le 12 A 38

Veröffentlicht am 6, Aug., 2025 Aktualisiert am 6, Aug., 2025 Romance
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Le 12 A 38


Un immeuble haussmannien, pas très loin de Nation, la façade bien ravalée, les balcons derrière leurs garde-corps en fer forgé bien tressé qui s’alignent jusqu’au sixième, les petites fenêtres derrière lesquelles les jeunes étudiantes présentées par les parents ont remplacé les femmes de chambre présentant de bonnes références, les ardoises gris anthracite parfaitement empilées en forme oblongue, accrochées au ciel qui s’est coloré comme pour mieux les montrer, un ciel gris perle mais pas sombre, sa lumière tamisée par les nuages bas, immobiles, et par les milliards de particules à la recherche d’une bronche d’enfant ou de vieille femme pour s’y cancériser.

Un trottoir parisien, fin octobre, juste avant la Toussaint, quand la bruine monte des pavés.

La porte sur rue est bien sécurisée. Vu le prix des appartements, c’est le minimum, et pas encore assez. Après le digicode changé régulièrement, une gardienne. Gentille, sympa, à qui la trentaine de bons voisins sur cour ou sur rue n’oublie pas de donner les étrennes, au risque de trouver leur courrier avec quelques jours de retard. Agent de sécurité, avant le jour où des recruteurs, sans scrupules, et aux salaires en espèce ne donnent un avenir professionnel à tous les grands blacks, dont le Bac+5 n’a pas donné le métier qu’ils attendaient, et la vie les quatre enfants qu’ils n’attendaient pas. La gardienne, elle, a appris à garder en gardant. Elle sait qui peut, qui doit, et qui n’entrera pas. Et qui salira ses tapis.

Et puis, comme ce deux fois minimum de sécurité n’est pas encore assez, il y a les portes blindées. Tous des propriétaires de coffre-fort, ces voisins de palier fort agréables au demeurant, participant presque tous à la fête annuelle, excellente idée, baissant le son dès 21 heure 30, ou quelque fois 23 heures une fois par mois lorsque les trois couples d’amis de longue date sont passés. Quelques fois, une des ados d’on ne sait plus quel étage, se fait tripoter un peu derrière la cage d’ascenseur, près des portes « réservées au service », mais les gloussements sont somme toute amusants, si ce n’est émoustillant pour ceux qui les écoutent quelques instants, tellement concentrés encore sur leur dossier d’une urgence capitale. La gamine qui lâche un « non, pas là », d’une voix claire et chargée de ses pulsions incontrôlées, rapporte des souvenirs à ces devenus responsables… comme quelque fois les odeurs de cigarettes qui font rire, qui passent de la cour jusqu’au hall, rappellent les concerts de Renaud avant qu’eux aussi ne soit devenus alcoolo.

Bref, un bon immeuble, calme et tranquille, où il fait bon vivre, où l’on peut s’affaler dans le sofa après une journée d’abrutissement de l’esprit devant un calculateur de valeur ajoutée ou face à des clients qui savent ce qu’ils veulent, avec deux chambres séparées dans lesquelles on peut dormir, hypnotisé par deux milligrammes de chimie ou soixante-quinze centilitres de vin de très bonne facture.

C’est ce que va s’apprêter à faire Sylvie.

Elle a vraiment mal, mais vraiment mal aux pieds. Usée par la journée.

« Qu’est-ce que c’est que ce type ? »

Posé, le dos collé, presque affalé sur la voiture stationnée face à la porte, il l’observe un peu trop fort depuis qu’elle approche.

Elle sent son regard sur son dos pendant qu’elle fait le code. Vraiment pas envie d’être sollicitée. Pourvu qu’il ne dise rien.

Presque 20 heures. Elle voulait rentrer plus tôt. Pas possible de quitter ce pot de départ, en l’honneur d’un collègue dont elle se fout royalement.

Trop mal aux pieds pour prendre l’escalier. Elle préfère attendre l’ascenseur qui doit encore être bloqué au quatrième.

Elle ne les avait pas vus tout de suite, pourtant le hall était éclairé.

Ils se tenaient à l’écart, presque cachés.

L’un dans l’angle de l’escalier. Grand, manteau long, noir, chaussures propres, par ce temps c’était étonnant, plutôt bon style, cheveux grisonnants.

L’autre était assis à côté de la porte de la concierge.

Pas vraiment assis, replié sur ses jambes. Il fumait ! Pantalon de jogging, baskets visiblement mouillées, blouson sky, le déguisement du cassos.

L’attente était pénible. De plus en plus.

L’ascenseur qui ne bougeait pas.

Et ces deux connards qui la matent. Lourd, très très lourd.

Elle ne les avait jamais vus ici.

De la lumière chez la concierge. Ça va.

Mais ils ne la lâchent pas, ni l’un ni l’autre.

Ça y est, il arrive. Enfin. Enfin, elle va pouvoir enlever ses chaussures.

La lumière venait de se couper. Merde ! Le grand lâche un mot : « Poupoune ? ».

Elle ne le voyait plus. Il était dans l’ombre de la clarté de la cabine presqu’ouverte. Mais qu’est-ce que c’est que ce type ?

La porte de la cabine enclenchée, sa tension retomba.

Elle ne supportait plus ces sollicitations, ces agressions verbales, ces demandes de tout pour tout. Elle enleva ses chaussures avant d’arriver au troisième, ouvrit la porte de l’autre main, la claqua du pied, lâcha son manteau, le sac, les chaussures dans l’entrée, et direction la salle de bain.

Elle se sentait bien moche ce soir.

Pas facile d’avoir 46 ans et de devoir être jeune et belle.

Elle était plus à l’aise avec son training tâché, son pull tout doux et ses chaussons Mickey. Et les soutien-gorge la serraient de plus en plus. Elle avait beaucoup pris dans les seins et ne les supportait plus.

Elle allait se faire un bain de pieds, avec du gros sel, ça soulage.

Éric ne rentrerait pas avant 22 heures, comme d’habitude. Au moins, il ne la faisait pas chier. Pas comme son ex-mari, collant comme un gosse sans sa maman. Il y a un moment qu’il ne l’avait pas relancé celui-là, il s’était calmé, il avait peut-être enfin trouvé une copine.

Le répondeur clignotait.

Elle espéra que ce ne serait ni le boulot, ni sa mère.

« Bonjour Poupoune. J’en ai connu des chaudes, mais des gourmandes comme toi, c’est rare. Je te promets que tu ne s’ra pas déçue ma grande. J’en ai baisé des gonzesses et des qui aimaient tellement ça que des fois elles demandaient qu’on soit plusieurs, et pis … … ».

Sylvie avait appuyé direct sur la croix du clavier.

Il y a vraiment des malades !

Mais comment a-t-il pu avoir son numéro ?

Elle était sûre d’être en liste rouge.

Cinglé.

Ça clignote encore.

« Jason, c’est moi. Salut Miss cougar. Je serai… »

Ça sonne à la porte. Merde.

Elle raccroche.

Elle va voir. Elle regarde par l’œilleton.

Elle ne reconnaît pas ce mec.

Costume, foulard sur la chemise, manteau bien plié sur le bras, petite sacoche en cuir à la main. Elle repensa à la blague de son ex, le spermatozoïde en cravate et petite valise, un vrai représentant de mes couilles. Elle eût un instant de sourire, ce qui lui fit du bien.

Jamais vu. Comment il a pu monter ?

Certainement pas un copain d’Éric, il aurait appelé. Et Éric n’a pas de copain.

Elle décida qu’elle n’était pas là. Et d’écouter le répondeur au cas où.

C’était quoi ce deuxième taré ?

« Jason… »

direct sur la croix.

Elle appuya sur la petite flèche.

« Je serai là à 20 heures 30, comme convenu. Tu me reconnaitras, je t’ai envoyé assez de photos. J’espère que tu me trouveras beau aussi en réalité. J’ai un peu peur. Mais tu verras, je suis vraiment sympa. En tous cas, merci pour ton invit’. Je suis content de te rencontrer, et sois rassurée, tout se passera bien ».

Sylvie était tétanisée.

C’était quoi ce truc ?

Ils n’avaient qu’un numéro, pour elle et Éric.

Elle ne comprenait rien. Elle pensait à sa fin de journée, au collègue qui avait versé une larme en disant au revoir à tout le monde comme s’il quittait sa famille cet idiot, à la langue de vipère de Magali qui l’avait encore fait passer pour une conne devant le directeur national.

Rien à voir.

Elle commençait à avoir peur.

Elle n’avait même pas entendu qu’il sonnait, ce bon dieu de téléphone. Pourtant, il était dans sa main. Sa mère, c’était sa mère ! Elle lui expliqua que depuis ce matin, impossible de laisser un message, sa boîte était pleine. Que tout allait bien, mais que pour vendredi il faudrait que… Sylvie lui coupa net la parole, enfin lui parla en même temps qu’elle, lui disant qu’elle allait rappeler dans dix minutes. Elle raccrocha.

Qu’est-ce que c’est que ces messages ?

Elle décida d’écouter les suivants.

Des voix fortes étaient sur le palier.Derrière sa porte ?

Elle fonça à l’œilleton.

Le représentant de mes couilles était encore là, et il y avait deux autres gars en plus. L’un frappa le second d’un grand coup du creux de la main sur la face de l’épaule. Celui-là reculait vers l’escalier. Le représentant regardait, en retrait, collé à la porte de l’ascenseur.

Comment étaient-ils montés ? Et la gardienne ?

Le téléphone sonnait encore, dans sa main.

« J’arrive ma Poupoune ! ».

Sylvie raccrocha aussi sec.

La panique était montée, elle aussi.

Elle fonça dans la cuisine, dans le placard du bas.

Elle allait se servir un petit apéro.

Non, la bassine pour le bain de pieds.

C’est débile.

Il fallait qu’elle appelle la gardienne, et puis Éric.

Et puis les voisins, Caroline, elle ne savait pas si elle était rentrée.

Elle retourna vers la porte.

Pas encore sur l’œilleton, la sonnette.

Sylvie fit un bond, un vrai bond, les deux pieds décollés du sol. Heureusement que le petit guéridon qu’elle tenait de sa grand-tante était là pour la rattraper ou elle se serait affalée comme une merde sur le porte-manteau ou dans le placard. Elle cogna dans son sac qu’elle n’avait pas posé. Bascule de côté, la main qui s’accroche au manteau jeté vite fait sur la chaise. Il ne tenait à rien. Elle s’éclata méchamment, même pas sur le tapis, juste au bord, le coude planté dans le carrelage, la tête cognée sur le casque d’Éric qu’elle lui dit sans arrêt de ranger ailleurs.

Ça sonnait !

Putain, elle s’était faite mal. Au coude, surtout.

Un grand coup de pied dans le sac. L’œil sur l’œilleton.

Toujours les mêmes, plus ceux qui étaient en bas tout à l’heure !

Elle sentit ses tripes devenir liquides. Les toilettes, il fallait qu’elle aille aux toilettes, maintenant.

Elle se décolla de la porte.

Non.

Il fallait qu’elle appelle. Les flics. Maintenant.

Elle se dit qu’il fallait qu’elle se calme.

Pour savoir quoi dire.

Elle appuya « Éric » sur son portable, se dirigea vers son répondeur, écouta l’annonce d’Éric « vous êtes bien sur le portable d’Éric Gernez, chef de projet et blablabla… », enclencha le bouton de son répondeur.

« poupoune, t’as l’air si bonne et si salope, je vais t’en donner à sucer… »,

« 20 heure 30 ? c’est ok ».

« tous tes messages, enfin je vais t’éclater le cul, à tout’ ».

« mon pote y m’avait dit qu’les vieilles… ».

Elle prit le boîtier dans sa main libre, elle le claqua par terre, juste à ses pieds.

Système réflexe.

Elle courut vers les toilettes.

Non, la salle de bain.

Non, la porte.

L’œilleton.

Le palier était plein !

Elle voyait dans l’escalier, il y avait au moins dix bonshommes.

De toutes sortes.

Des tout jeunes. Des blacks. Des autres.

Et du bruit.

Ça gueulait en fait.

Des insultes, elle les entendait.

Des « va te faire foutre », « d’où tu viens toi » et autres « casse-toi, gros con ».

Le téléphone, le fixe, qui sonnait encore. Elle avait le portable dans sa main.

Salle de bain. Elle était en larmes, elle tremblait de partout. Sa diarrhée s’était lâchée, sur ses jambes, avec une odeur pire que la pire.

Elle poussa comme une folle, tout ce qu’elle pouvait, pour mettre le gros meuble devant la porte. Les bouteilles de parfum,

les tubes de crème, les rouleaux de PQ, tout se cassa la figure, étalé partout dans un bruit de bordel à faire sauver un manouche. Elle avait mal au coude, super mal.

Ses doigts tremblaient sur le clavier.

« Au secours ».

Éric. Merde, merde, c’est où ?

Le 17, non le 15. C’est quoi la police ?

Elle s’entendit crier.

« Au secours, aidez-moi ».

Après cinq sonneries, elle eut enfin quelqu’un. La police, enfin.

La voix à peu près posée, elle donna l’adresse, l’étage, le numéro d’appartement, expliqua les bagarres dans l’escalier et la concierge qui avait dû, enfin c’est sûr, qui avait été agressée. La voix de femme répondit qu’ils avaient déjà reçu deux appels pour ces faits, et qu’une équipe était partie. Qu’elle devait se rassurer, que les agents seraient sur les lieux très rapidement.

Elle inspira très fort.

Ça allait un peu mieux, mais il lui fallait de l’air. Elle se regarda un instant dans le miroir, ne se vit même pas, et ouvrit la fenêtre.

Fenêtre sur rue.

Il y avait au moins dix personnes au pied de l’immeuble !

Mais c’était quoi ?

Une vente rare, une mise aux enchères ?

« Poupoune » ?

Un sms.

« k es ce ki a ? ».

Éric.

Quel connard ce mec !

Enfin, les flics.

Voiture en travers, gyrophare. Une seconde arrivait au même instant.

Elle repoussa le meuble. Ce qui était resté encore en place n’y résista pas. Il y en avait partout. Elle tira la porte qui finit d’écraser les crèmes répandues sur le plancher teck aux joints vernis et parfaitement lissés.

Elle se dit un instant que quelqu’un était dans l’appartement ?

Non.

Elle regarda, se jeta sur le présentoir à couteaux, pris le grand, pour les viandes, et le serra bien, dans sa main droite, avec le portable dans la gauche. Elle était prête à tuer.

La porte. L’œilleton.

Des cris. Ils criaient tous !

Certains montaient. Les autres prenaient l’escalier vers le bas, tirés par deux policiers en uniforme. Enfin !

Trois gros coups dans la porte.

« Ouvrez ! Police »

Sylvie s’entendit dire « Vous êtes qui ? »

Elle vit apparaître dans l’œilleton madame Sanchez. La concierge !


Trois jours et quatre nuits que Fred n’avait pas décollé de l’ordinateur.

À peine mangé.

Quelques sardines, pas mal de vin, du rosé.

Il riait.

Comme peuvent rire les hommes pétris par la haine, asphyxiés par la vengeance. Son menton vibrait en permanence. Ses yeux étaient trop gros pour les orbites, son teint opaque, ses cheveux devenus fins et ternes, fourchus, cassants, étaient coupés courts.

Ses mains étaient sèches et anguleuses, rouge bleuté par le manque d’oxygène.

Et il riait. Il spasmait plutôt.

Il en ferait bien encore un petit dernier.

Pour la faire chier cette putain de salope.

Il aurait dû la cogner avant qu’elle ne se tire, Sa Sylvie. Il s’était dit souvent que c’est ça qu’elle voulait.

Et puis surtout se taper des mecs.

Cocu !

Il avait décidé que jamais, jamais il ne l’avalerait, et qu’elle, Sylvie, sa femme, elle s’en souviendrait.

Et puis les sites de rencontres, et puis un faux profil pour voir ce que disent les autres mecs, et puis,

un tchat sur la messagerie, lui en fausse femme et l’autre en face surexcité en moins d’un quart d’heure.

Et puis, il a trouvé comment la faire chier.

Elle voulait des mecs, elle allait en avoir.

Pas si facile de tchater avec huit profils en même temps. Mais il avait des bonnes photos d’elle. Et puis le copier/coller ça marche bien. Un petit rendez-vous à tout le monde en même temps. Pour se faire lécher le gland, il y aura du monde !

Il ne savait plus exactement, s’il en refaisait un, ça ferait trente-deux ou trente-trois ?

20 heures 30. Précise. Le code c’est 12 A 38.

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