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Ma Maladie et Moi

Ma Maladie et Moi

Veröffentlicht am 9, Sept., 2025 Aktualisiert am 9, Sept., 2025 Gesundheit
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Ma Maladie et Moi

Cher journal, Je m'appelle Fanta et j'ai un très grave problème : mon infirmière refuse que je mange du chocolat !

Elle s'appelle Lala Aïssata, elle vient de Ndar comme moi. Elle a une belle peau et un petit nez comme celui des mannequins. C'est la première personne que je vois à mon réveil, et la dernière avant l'extinction des feux. Lala et moi, nous avons notre routine. Tous les matins, elle entre comme un rayon de soleil dans ma chambre. Elle prend mon poids, ma température et ma pression artérielle, s'assure que je fais bien ma toilette, que je mange et discute avec moi un long moment. Ah, et elle m'apporte des livres aussi ! Elle est gentille, Lala, en général. Mais dès qu'il s'agit des sucreries que me ramène mon frère, Lala se braque.

J'ai réussi à en cacher quelques-uns aujourd'hui. Dès que mon frère est reparti, Lala a débarqué. Trop tard ! Les chocolats s'étaient volatilisés.

_Mor a oublié d'en acheter tellement il est débordé par ses études de médecine, lui ai-je assuré.

Ce n'est pas tout à fait un mensonge car il avait des cernes sous les yeux, le pauvre.

Lala a eu beau chercher, elle n'a rien trouvé. Elle m'a jeté un regard suspicieux, puis est sortie. Je crois que je l'ai agacée.

Lala s'inquiète toujours tellement pour moi. Ah oui, j'oubliais ! Je suis atteinte d'une maladie très rare : la leucémie aiguë. Les docteurs m’ont expliqué que mon corps se défendait très mal contre les infections, à cause de la maladie. J'avoue n'avoir jamais su d'où venait l'accent dans le nom de la maladie. Je n'ai pas non plus rencontré de personne atteinte de leucémie grave ou circonflexe, ce qui me rend un peu isolée. Non pas que je souhaite qu'il y ait plus de malades, mais un peu de compagnie ne me ferait pas de mal !

C’est ma mère qui m’a offert ce cahier pour que j’écrive sur ma maladie et sur moi. Ça m’aide à supporter l’isolement. Les docteurs me font des perfusions tous les jours en prévision de la greffe. Il y a des jours où c'est assez supportable et d'autres où ça me donne envie de pleurer. Pour l'instant, je n'ai que Lala et le balai incessant des docteurs pour me distraire. Bien sûr il y a aussi ma famille et même quelquefois les médias. Je suis une star, tu sais ? La toute première patiente atteinte de leucémie traitée sur le sol sénégalais. Lala dit que je suis une petite reine dans l'hôpital, c'est pourquoi j'ai droit à ma propre chambre et à toute l'attention du personnel et des médecins. Tous les enfants malades n'ont pas cette chance, je le sais.

Et enfin il y a ma voix intérieure, ma dame de compagnie dans ce grand palais vide. Je sais, c'est bizarre, mais je la considère comme une sœur de l'ombre, un gros chat affectueux. Elle m’aide à prendre des décisions, à me calmer lorsque la douleur fait disparaître le monde derrière son voile sombre. Si on la néglige un peu, elle se rebiffe, se fâche, s'irrite contre nous. Il faut savoir la caresser dans le sens du poil, l'amadouer avec de petites attentions, lui montrer qu'on ne l'oublie pas et qu'on la considère.  C’est un grand enfant en manque d'attention. Tout le monde en a un dans un recoin de sa tête. Le mien est juste plus tapageur.

Cela fait deux mois que je suis ici et j’ai vraiment hâte de rentrer. Je n'aime pas les médicaments et mes cheveux tombent depuis que je les prends. C'est affreux ! Pour passer le temps, je lève les yeux vers le plafond immaculé et laisse mon esprit vagabonder. Je le fixe à longueur de journée jusqu'à m'en abîmer les yeux. On en fait des découvertes lorsqu’on prête attention. D’abord les nuances de blanc qu’il peut y avoir, ensuite les couleurs qui apparaissent lorsqu’on y regarde de plus près. Le carré blanc laisse enfin place à un vortex époustouflant de couleurs. Rien d'étonnant à cela : mon frère m'a souvent dit que la couleur blanche est un mélange de toutes les autres. Pourquoi mes yeux ne pourraient-ils pas les distinguer, dans ce cas ?

Par cette fenêtre ainsi ouverte, un tout nouveau monde s’ouvre à moi. Oui, tout à fait ! Au-delà du capharnaüm de couleurs, je distingue un vaste océan à portée de main. Je n'ai qu'à la tendre pour me retrouver à baigner dans ces eaux vertes et peu profondes. Le sel chatouille déjà mes narines, l'eau me caresse la peau. Un peu plus loin, la plage me tend les bras. Alors je me mets à nager, sereine et immunisée contre le monde extérieur. Un instant plus tard, mes pieds s’enfoncent dans le sable chaud et doré.

Je me retourne pour contempler l’immensité de l’océan baignée de soleil. Je reste là, apaisée. C’est le retour des docteurs qui m’extirpe du songe.

Je retourne souvent dans ce sanctuaire isolé et hors du temps. Je ne me lasse pas d'explorer toutes les merveilles qu'il recèle. Il y fait toujours beau, comme dans mon pays. De plus, j'ai les plus beaux animaux du monde pour compagnons de jeu. La plage déborde de petits coquillages abritant des mollusques. Je me saisis d’une coquille, son habitant se réfugie aussitôt au fond de son logis. Il me faut ruser pour l’amener à en ressortir, timide et craintif. Les crabes se déplacent sans me prêter beaucoup d’attention. Ils sont un peu intimidants avec leur démarche étrange. Au ras de la marée, une colonne de bébés tortues marche courageusement vers les flots. La marée se soulève, un groupe de tortues entame une valse sous mes yeux ébahis.

Mais le plus incroyable reste l’océan vert qui s’étale à perte de vue. En nageant jusqu’à la terre ferme, j’ai remarqué que je respirais sans trop de difficultés. Il semble que cette eau ne soit pas ordinaire. Eh bien, soit j’étais devenue Mami Wata, soit je pouvais respirer sous l’eau comme les poissons ! Pas d’autres explications !

Ma première plongée en eaux profondes m’a fait découvrir une incroyable diversité sous-marine. Sous les rayons solaires, chaque corail, chaque poisson, chaque algue brille de mille feux. Dans ce monde aquatique au soleil éternel, les merveilles se bousculent devant mes yeux.

Dès que Lala a le dos tourné, je replonge aussitôt dans ce songe onirique. Après un débat avec moi-même, j’ai conclu que ce monde merveilleux n’existe pas dans la réalité. Il n’y a qu’à voir le comportement étrange de l’océan et du soleil ! Mais une rencontre inattendue m'a fait changer d'avis.

J'étais allongée à l'ombre d'un des innombrables cocotiers de la plage quand une petite fille est apparue. Elle était habillée d'un pagne de cotonnade et d'une camisole aux couleurs chaudes. Un morceau de bois coincé au coin de la bouche, elle affichait un air ennuyé. Ses pieds nus avalant le sable d'une démarche aérienne, elle avait l'air de la parfaite petite fugeuse en vadrouille sur la plage.

Jusque là elle avait l'air tout à fait normal. Une fois à ma hauteur, j'ai enfin remarqué ses yeux. Ils étaient d'une couleur qui n'avait pas de nom, une couleur qui, si elle était présente dans notre réalité, ne saurait être décrite que par une odeur : celle entêtante de la noix de coco. Voilà. Impossible de décrire cette couleur inédite autrement. Il m'a semblé impossible qu'une paire d'yeux dans ce monde puisse rivaliser avec les siens.

Bien que plus jeune et très differente de moi, je n'ai pas eu besoin de lui demander qui elle était. C'était évidemment ma voix intérieure, mon amie, ma confidente : mon alter ego. Elle avait concocté ce refuge pour donner du répit à mon esprit ravagé par l'ennui, faute d'en donner à mon corps souffrant.

— Tu m’accompagnes ? Je vais plonger.

_Je n’aime pas la mer. Je n’en ai pas envie. Le sel va abîmer ma peau.

Je ris alors elle grince des dents.

"Si tu te moques de moi je promets de te tirer les cheveux !"

"Attention, je suis plus âgée que toi, menace-je, peu amusée que cette gamine me parle sur ce ton. Tu me dois un minimum de respect."

"-Hm !"

Elle renifle avec dédain et donne un coup d’épaule dans l’arbre près de nous. Un coco manque de m’aplanir le crâne.

"Hé ! Fais attention !

Je suis plus forte que toi, dit-elle en croisant les bras avec orgueil.

Du calme, d’accord ?Moderai-je.

Je ramasse le fruit et le lui présente en signe de paix.

Mangeons-le ensemble."

Nous nous installons au bord de l’eau. Une vague un peu forte manque d’emporter mon invitée. Un rire cristallin monte jusqu’au soleil. Nous nous sourions.

Même si au fond, je sais qu'elle n'a pas mauvais fond, mon alter ego est une sacrée tête de mule. Pas étonnant qu'elle ait choisi l'avatar d'une gamine pourrie gâtée. Après quelques accros, je finis par la connaître. Nous passons nos journées à courir sur la plage, à boire l'eau des cocotiers et à nous refaire nos tresses l'une l'autre.

"Applique-toi un peu, Fanta !"

"Ne remets pas en doute mes talents de coiffeuse, enfant pourrie gâtée !"

D’ailleurs, si nous sommes la même personne, comment se fait-il que je sois son aînée ?  Avant que je puisse l’interroger, elle se remet à geindre.

"Tu sais que je pourrais te faire taire, étant donner mon statut d’aînée."

"N’oubliez pas que je suis la plus forte de nous deux, s’indigne-t-elle."

" J’ai plus de savoir que toi, j’ai exploré la mer, je connais tous les récifs à des kilomètres à la ronde…"

"Peut-être, mais tu ignores également des choses !"

"Comme tout le monde, je crois. Mon frère dit toujours que nul ne sait tout ici-bas."

"Lui je ne l’aime pas, marmonne-t-elle."

"Parle mal de mon frère et tu auras affaire à moi ! D’ailleurs, si tu te crois plus savante que moi, dis-moi donc comment ce monde a pu naître ? "

" Comment ça ?"

"Je sais que nous ne sommes pas dans la réalité. Où sommes-nous alors ?"

"À quoi ça t’avancerait de le savoir ? Tu ressembles de plus en plus à Mor, à vouloir tout savoir sur tout…"

"Laisse mon frère tranquille ! Techniquement, c’est aussi ton grand frère, d’ailleurs, non ?"

Elle ne répond pas et se met à bouder.

Un peu plus tard, elle propose :

"Faisons la course, nous saurons ainsi pour de bon qui de nous deux est la plus forte."

Je souris. Il n’y a personne pour me battre de ce côté-là, je suis la reine de l’esquive. Bien sûr, elle perd. Et se met à geindre de nouveau. Encore plus prévisible.

C'est dans cette atmosphère étrange que j'ai partiellement évolué durant les mois suivants. Mes résultats médicaux fluctuent de même que l'humeur de mon amie. Parfois, elle m'ignore, posée sur la plage, face aux vagues. D'autres, c'est elle qui initie le jeu. D'autres encore, elle ne vient tout simplement pas.

Ce monde dont j'ai rêvé n'est pas dans la réalité. Mais n'est-il pas réel pour autant ? Je suis sûre que ces moments merveilleux passés au bord de l'océan sont bien réels.

Ce matin, Lala débarque le sourire aux lèvres.

"Bonne nouvelle ! Tu vas sortir cette semaine, Fanta ! "

Je crois que j’ai hurlé de joie. Ma voix intérieure, qui ne se manifeste plus que dans le monde aquatique, est restée silencieuse. Lala, elle, est enthousiaste à l’idée de ma sortie.

"Allez, sors de ce lit et danse avec moi !"

La greffe pratiquée par les docteurs a visiblement été un succès. Après huit mois d'hospitalisation, je rentre enfin chez moi ! À moi les chocolats à volonté !

"Je suis triste que tu parte et m’oublie, mais tu merites de sortir vivre les meilleures années de ta vie sous les rayons du soleil !" S’exclame mon infirmière.

Durant cette semaine, j’ai beau tenté de retourner au monde aquatique, je ne le peux pas. Dans ma tête, je suis seule. Je me rends alors compte que la présence de mon alter ego s’estompe depuis un certain temps déjà, sans que j’y fasse attention. Je commence à prendre peur. Je suis un peu triste et même ma famille commence à s’en rendre compte.

"Qu’est-ce qu’il y a, Fanta ? Me demande Mor. Tu as faim ?"

Je ne suis plus notre conversation depuis un moment, alors il s’inquiète sans doute.

"Une amie qui m’est chère me manque, soufflai-je.

Ma dernière nuit à l’hôpital, je me réveille enfin dans le monde aquatique. Elle est là qui m’attend, sous ce même cocotier où elle m’a trouvé la première fois. Je la rejoins, tout sourire.

"Ouf ! Tu n’as pas disparu ! Je suis rassuré, tu étais si silencieuse dernièrement. "

Elle me tourne le dos comme si elle boudait. Rien de bien nouveau.

"Tu sais qu’on rentre demain, n’est-ce pas ? Ah ! Ce soleil permanent va presque me manquer !"

Elle se retourne enfin et je croise ses yeux irréels. Ils brillent comme des cristaux. Oui, comme l’éclat de chaque chose dans ce monde solaire et chaleureux. Son visage impassible s’anime soudain. Pour la première fois depuis ce rire lors de notre première rencontre, elle sourit de toutes ses dents.

"C’est super !"

Après quelques heures à papoter, je me sens aspirée vers l’extérieur.

"Bon, c’est l’heure. On se revoit plus tard !"

"Fanta ?"

"Oui ?"

"J’adore discuter avec toi. Ça m’a appris des tas de choses !

Les appels de Lala me font ouvrir les yeux sur la chambre baignée de lumière.

"Ça c’est le sourire de celle qui rentre à la maison, s’amuse Lala.

Oui. Je rentre aujourd'hui. Quelle étrangeté que de vivre une aventure avec soi-même ! J’ai hâte de passer plus de moments avec mon alter ego.

Je m’arrête là pour aujourd'hui !

Je te revois bientôt !

.


Tandis que Fanta referme son journal intitulé Ma maladie et moi, de l'autre côté du voile, la maladie lève ses yeux odeur noir de coco vers le ciel étoilé. Elle soupire. L'ocean n'a jamais été aussi morose. Un sourire étire timidement ses lèvres.

"Adieu Fanta."

.



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