Épisode 19 - Cauchemar
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Épisode 19 - Cauchemar
POV Logan
― Comment ça, ton père vient pas ? Je croyais que ces déjeuners étaient obligatoires pour toute ta famille ?
Morgan se tenait là, face à moi, les poings serrés et le visage rouge de colère. Nous étions sur la terrasse du salon, seuls dans la fraîcheur de cette fin de matinée. Elle m’avait traîné dehors juste après avoir salué ma mère et ma tante. Juste après avoir entendu que mon père et mes frères ne se joignaient pas à nous pour le repas.
― Tu ne lui as pas dit que tu venais accompagner aujourd’hui ? siffla-t-elle.
Je l’observai un court instant avant de laisser échapper un rire amer. J’avançai vers elle lentement, parlant dans un murmure dur et sombre :
― Si tu voulais te servir de moi pour te rapprocher de mon père, tu as misé sur le mauvais cheval. Je ne suis et ne serai jamais le fils prodigue. Tu devrais tenter ta chance avec Kévin, il était encore célibataire aux dernières nouvelles.
Morgan secoua la tête, furieuse, puis s’immobilisa. Elle ferma les yeux et inspira profondément, relâchant peu à peu tous les muscles de son corps. Quelques secondes passèrent avant qu’elle ne papillonne des paupières et affiche un sourire éclatant d’hypocrisie sur ses lèvres peintes.
― Ce n’est pas grave, marmonna-t-elle pour elle-même. Juste un petit contretemps. Rien de grave… Il viendra peut-être plus tard dans la journée.
― Aucune chance, rétorqua Anny qui venait d’apparaître à la porte-fenêtre encore ouverte derrière moi. Il a une réunion importante au sujet d’un nouvel accord. Mais pourquoi tu tiens tant à le rencontrer ?
Morgan tapa du pied avec colère, les poings serrés comme une gamine capricieuse, puis, sans même un mot pour moi, s’éloigna en jurant.
― Tu t’en vas, chérie ? criai-je d’un ton faussement déçu.
Elle m’ignora totalement. Ne se retourna pas. Ne me répondit pas. Et je n’ai pas pu m’empêcher de ressentir un soulagement en la regardant partir. Je n’ai pu contenir ma satisfaction en la voyant disparaître.
― Tu sais qu’elle retentera sa chance le mois prochain ? raya Anny. Ce serait une bonne chose de découvrir pourquoi elle souhaite se rapprocher de ton père. En espérant que ce n’est pas pour discuter mariage… Hors de question que je sois sa demoiselle d’honneur !
Un rire nerveux me secoua les épaules alors que mes yeux s’accrochaient à la silhouette de Morgan au loin. Je ne pourrais jamais épouser cette folle. Je n’y arriverais pas. Je n’y survivrais pas !
― Alors, tu vas me dire pourquoi tu as gardé cette histoire de contrat pour toi ? Pourquoi t’es pas venu me voir ? Je croyais qu’on devait rien se cacher !
Je me tournais vers ma cousine, las de toute cette situation. Contre toute attente, il n’y avait aucune colère, aucun mépris, sur son visage. Non, elle paraissait plutôt blessée par mon silence. Trahie.
― Je suis désolé, soufflai-je. Je n’ai jamais eu l’intention de te mettre à l’écart. Mais tu es si proche de Lili. Je ne voulais pas que tu fonces sur Morgan et que tu lui balances ses quatre vérités devant tout le lycée. Tu peux vraiment être flippante, tu sais ?
Anny soupira lourdement avant d’acquiescer.
― Je sais. Je comprends. Mais ça veut pas dire que je te pardonne ! Tu es toujours un crétin.
Je l’attrapai par le bras et l’attirai doucement vers moi pour un câlin. Sa tête sur ma poitrine. Mon menton reposant sur ses cheveux soyeux. Nous restâmes ainsi quelques instants, jusqu’à ce que ma mère nous appelle pour l’aider à dresser la table.
― Allez. Rentrons. Je meurs de faim, s’exclama ma cousine en s’extirpant de mon étreinte.
Arrivés dans la cuisine, ma tante leva les yeux de sa préparation et nous offrit un sourire maternel. Elle chercha Morgan du regard avant de faire une grimace de mécontentement.
― Trop bien pour donner un coup de main à ses hôtes ? fit-elle remarquer d’un ton moqueur.
Je haussai les épaules en m’approchant du plan de travail pour récupérer la pile d’assiettes.
― Non, elle avait mieux à faire aujourd’hui, je crois, déclarai-je d’une voix sans émotion.
― Et toi, tu pourrais trouver bien mieux que cette petite peste arrogante, rétorqua ma tante.
― Amen, souffla Anny.
Je la fusillai du regard, mais préférai garder le silence. J’étais fatigué et je n’avais aucune envie de me battre. Pas avec Anny. Pas alors qu’elle connaissait les enjeux… Les bras chargés de vaisselle, je rejoignis ma mère dans la salle à manger. Elle était occupée à installer sa plus belle nappe immaculée sur l’immense table en acajou. Une odeur de propre et de fleurs sauvages flottait dans l’air. Un doux rappel de mon enfance, de ces heures à jouer avec mes cousins dans nos forts de draps et de couvertures fraîchement lavés. Quand elle eut fini, elle décora le centre de vases de cristal remplis de tulipes blanches et y ajouta quelques bougies pour une ambiance accueillante.
Sans un bruit, je posai les assiettes sur le buffet attendant qu’elle termine.
― Parfait, murmura-t-elle avant de lever les yeux vers moi.
Un sourire radieux illumina son visage délicat. Plusieurs mèches de ses longs cheveux blonds s’étaient échappées de son chignon lâche et lui tombaient sur le front. Elle les glissa distraitement derrière ses oreilles et vint me serrer affectueusement dans ses bras.
― Mon chéri, qu’est-ce qui te tracasse ? Et ne dis pas « Rien ». Une mère sait toujours quand son enfant va mal.
― Je…
Dans cette étreinte chaleureuse, je me laissai aller, le nez dans son cou, respirant son parfum sucré et réconfortant. Mes yeux brûlaient de larmes non versées et ma gorge se nouait d’angoisse. J’hésitais, cherchant vainement à faire le tri dans mes pensées. Mon inquiétude constante pour Lili et les menaces qui planaient sur elle. Ma peur face cette union arrangée qui me rongeait.
― Il panique à l’idée que Morgan puisse être la future madame Logan Cohnrad, lança Anny derrière moi. Et moi aussi ! L’idée de devoir supporter sa voix grinçante à chaque repas de famille… J’en ai des frissons.
Ma mère s’écarta doucement, un sourire aux lèvres, et nous regarda l’un l’autre. Son rire mélodieux et bienveillant éclata. Il perdura quelques minutes, laissant place à un étrange calme, alors qu’elle retrouvait son sérieux habituel.
― Tu crois vraiment que ton père te marierait à la fille de son plus vieil ennemi et concurrent ? Si elle avait été fille unique, je pense qu’il l’aurait envisagé juste pour prendre le contrôle de la famille Tomson et de leur entreprise. Bien que je doute que Richard, le père de Morgan, ait accepté un tel arrangement. Mais, fort heureusement, Tate est là pour prendre la relève. J’ai entendu dire qu’il avait terminé ses études et qu’il allait bientôt rentrer pour travailler avec son père.
À ses paroles, un poids énorme disparut de ma poitrine. J’eus soudainement l’impression de pouvoir respirer librement.
Ma mère secoua la tête, perplexe, et me demanda :
― Mais pourquoi cette inquiétude ? Ce n’est pas ta petite amie ?
― Si…
― Non ! s’écria Anny en même temps.
Ma mère me lança un regard interrogateur. Je soufflai.
― C’est compliqué… avouai-je alors.
― Eh bien, je te conseille de trouver une meilleure réponse quand ton père l’apprendra. Il ne verra pas d’un bon œil que tu sortes avec Morgan Tomson. Surtout avec votre accord actuel…
― Justement, intervint Anny. Tu sais qui Logan va devoir épouser ?
Ma mère fit non de la tête avant d’ajouter :
― Philip ne parle pas de ses affaires avec moi, tu sais. Mais il me semble l’avoir entendu mentionner le nom de William. Il s’agit d’une vieille famille de la région, mais je n’ai pas plus de précisions concernant la jeune fille.
― William ? Il n’y a personne de ce nom au lycée, soupira ma cousine en se tournant vers moi. Ton père n’a pas dit qu’elle était dans notre lycée, pourtant ?
Je réfléchissais à toute vitesse, tentant inutilement de me remémorer chaque détail de cette conversation.
― Oui, il me semble. Mais je l’ai pas laissé terminer. Je crois qu’il a parlé d’un nouvel associé et de ce mariage pour renforcer leur alliance, grommelai-je.
Ce soir-là, j’étais bien trop en colère pour l’écouter. Je me sentais piégé, un pion futile sur l’échiquier de Philip Cohnrad, sans espoir de pouvoir y changer quoi que ce soit.
― Et le contrat que tu as signé ? Il doit bien y avoir le nom de ta future épouse !
― Je ne sais pas… avouai-je en passant une main derrière ma nuque.
― Logan Cohnard, s’exclama ma mère. Ne me dis pas que tu as signé cet accord sans même le lire !
― Non, bien sûr que non, m’écriai-je vexé qu’elle puisse penser une seconde que je serais capable d’une telle connerie. J’ai même fait appel à un avocat qui n’était pas à la botte de papa. Et ça n’a pas été facile à trouver ! Crois-moi. Mais je n’ai pas lu le paragraphe sur le mariage. Ne pas savoir m’aider à rendre les choses moins concrètes. Putain !
Perdu dans mes pensées, je faisais les cent pas autour de la table, mes doigts s’accrochant à mes cheveux. Maugréant contre ma propre stupidité.
― Logan. Logan ! m’appela ma mère.
Je me stoppai net et levai les yeux vers elle. Elle m’adressa un sourire compatissant avant de me demander où se trouvait ma copie du contrat.
― Pourquoi ?
― Pour découvrir avec qui tu t’es engagé, crétin ! se moqua Anny en me donnant une claque derrière la tête.
Je sortis mon téléphone pour consulter ma boîte mail. J’avais envoyé une version électronique à mon avocat. Je cliquai sur la pièce jointe et le document s’afficha. Je fis défiler les pages jusqu’au passage contenant les clauses du mariage.
« Conformément aux termes de l’accord conclu entre Philip Cohnrad Senior et Roberts William, Logan Cohnrad s’engage, une fois son diplôme universitaire obtenu (cycle de cinq ans maximum), à officialiser ses fiançailles avec mademoiselle William, héritière de l’empire William, et à l’épouser dans l’année subséquente. »
― Putain ! m’énervai-je après une deuxième lecture du paragraphe.
― Quoi ? demanda Anny inquiète.
― Mademoiselle William. Pas de prénom. Pas d’autres informations. Ça pourrait être n’importe qui ! grognai-je de frustration.
Anny m’arracha mon téléphone et survola le contrat à une vitesse alarmante. Lorsqu’elle releva brusquement la tête, l’air soudainement préoccupé, comme si elle avait découvert un détail crucial, je me préparais déjà au pire.
― Attends, l’accord a été conclu par Philip Cohnrad Senior ? Par grand-père ? C’est quoi cette connerie ?
Ma mère émit un son étrange et l’assiette qu’elle tenait encore glissa de ses doigts. Elle se baissa précipitamment pour ramasser la porcelaine brisée tout en marmonnant des mots indescriptibles.
― Maman. C’est quoi cette histoire ?
Elle évita mon regard, semblant soudainement agitée. Ses mains tremblantes s’efforçant de rassembler les morceaux tranchants éparpillés sur le carrelage.
Son silence ne fit qu’attiser ma colère. Mais avant que je ne puisse la questionner, elle se redressa et fila vers la cuisine. Je savais parfaitement qu’il était inutile de la suivre. À sa réaction, je savais qu’elle ne parlerait pas.
― C’est quoi ce bordel ? siffla Anny.
Scrutant la pénombre du couloir, je secouai la tête en réponse.
― Aucune idée, mais je vais devoir tirer ça au clair. Et vite…
POV Lili
J’attendais, seule, assise dans une pièce stérile à l’odeur écœurante de produits chimiques. J’ignorais comment j’étais arrivée ici, mais une douleur sourde envahissait chaque cellule de mon corps. Ma tête lourde. Mes muscles sensibles et raides. Mon ventre dur et gonflé. Un bourdonnement lancinant à mes oreilles faisait écho à ma détresse grandissante. Et ce poids oppressant dans ma poitrine ne pouvait signifier qu’une chose : il y avait un problème. Non. J’avais un problème.
Je fermai les yeux quelques instants, pour me détendre. Pour me ressaisir. Les mains agrippées au drap médical qui recouvrait mes jambes, je respirai profondément.
― Je suis désolée.
J’ouvris brusquement les paupières pour me trouver face à une femme, peut-être la cinquantaine, les cheveux tirés dans un chignon strict, le visage austère. Presque inquiet. Sur sa blouse blanche, une étiquette indiquait « Dr Fleur Jonson ».
― Pourquoi ? bredouillai-je la voix rauque.
Elle me tendit un dossier, mais étrangement, j’étais incapable de déchiffrer le moindre mot.
― Je ne comprends pas… soufflai-je en secouant la tête.
― Tu es enceinte, Lili.
Non. Non. C’était impossible. J’étais encore vierge. Je n’avais même pas fini le lycée. Je ne pouvais pas être enceinte.
Tout se mit à tourner. La nausée me serra la gorge. J’avais l’impression d’étouffer. J’avais besoin d’air. J’avais besoin de sortir de cette chambre d’hôpital, mais lorsque j’essayai de quitter mon lit, des entraves me retenaient. J’étais piégée.
Le visage du médecin apparut, comme s’il flottait devant moi. Il se déforma lentement en un rictus effrayant. Un rire diabolique s’échappa de ses lèvres figées en un sourire pervers.
― Tu portes l’enfant d’Éric, petite trainée. Tu as aimé, n’est-ce pas ? Regarde comme tu t'amuses bien !
Des images défilaient : moi, allongée sur le dos, les joues rougies et les yeux vitreux, les doigts froissant les draps ; moi, à genoux, nue et indécente, du sperme dégoulinant sur mon visage et ma poitrine ; moi, à quatre pattes sur le matelas, les fesses écarlates… Mon partenaire était une ombre floue. Seuls ses mots crus susurrés à mon oreille semblaient réels. Seuls ses propos salaces et les bruits obscènes qui sortaient de ma bouche. J’en eus un haut-le-cœur.
― Stop… [sanglots] stop, s’il vous plait, suppliai-je d’une voix tremblante. Je ne veux pas revivre ça. Laissez-moi tranquille.
― Tu sais ce qu’il te reste à faire pour que tout s’arrête, me murmura le médecin.
Je déglutis à cette idée. Oui, je savais exactement ce que je devais faire.
Le décor changea brusquement. Les murs blancs et stériles laissèrent place au carrelage noir et argenté de la salle de bains de notre maison en Californie. Je n’étais plus attachée à un lit d’hôpital, mais j’étais allongée dans la baignoire. L’eau était froide et écarlate. Dans ma main droite, je tenais encore la lame du rasoir de mon père.
― Voilà. Ferme les yeux, sale putain. Ton bébé est déjà parti. Je m’en suis chargé. Il ne reste plus que toi. Personne ne te regrettera. Tu ne manqueras à personne…
Les larmes coulaient le long de mes joues glacées, alors que la réalité s’effaçait peu à peu. Je me sentais engourdie. Presque soulagée.
― Lili ! Lili, réveille-toi !
Un gémissement de douleur s'échappa de mes lèvres sèches lorsque deux grandes mains attrapèrent mes épaules et me secouèrent. Quelqu’un criait, je pouvais déceler de l’inquiétude, de l’angoisse, dans la voix, mais j’étais bien incapable de comprendre les mots. Les phrases. Mon esprit sortit doucement de ce brouillard cauchemardesque dans lequel j’étais plongée. J’avais dû me rendormir après le départ de mon père et mes démons s’étaient invités malgré moi. Toujours les mêmes depuis mon avortement.
Mon corps grelottait, alors que la sueur perlait dans ma nuque et le long de ma colonne vertébrale. Mes cheveux en bataille collaient sur mon visage trempé de pleurs. Ma respiration était rauque et ma gorge douloureuse comme si j’avais hurlé pendant des heures.
Le lit derrière moi s’affaissa et je sentis une chaleur intense dans mon dos. Des bras me serrèrent, m’empêchant de bouger. Et une odeur de pin et de pluie me submergea.
― Chut, Lili…, me chuchota Ryan.
Je sanglotai alors que les souvenirs m’assaillirent, me blottissant contre la poitrine de mon ami.
― Tout va bien, Lili. Je suis là.
― Je t’ai déjà parlé du harcèlement, commençai-je d’une voix presque désincarnée. Des photos et vidéos qui tournaient au lycée et dont j’étais l’actrice principale. Mais je ne t’ai pas tout dit…
Je pris une profonde inspiration et fermai les yeux quelques instants. Ryan bougea derrière moi. Je pouvais sentir son corps se tendre d’appréhension.
― Tu n’es…
― J’ai besoin que ça sorte, sinon je vais devenir folle, le coupai-je. Après cette soirée, tout est confus. Je suis restée enfermée dans ma chambre pendant des jours, refusant de manger. Mon père était tellement inquiet, qu’il a fait venir une femme médecin d’une ville voisine. Ce jour-là, j’ai saisi ce que mon corps tentait désespérément de me faire comprendre : j’étais enceinte. Enceinte de mon violeur.
Ryan me serra plus fort contre lui, luttant contre la colère qui montait en lui.
― Je crois que c’était trop pour mon esprit. J’ai basculé dans la folie et je suis restée inconsciente pendant plusieurs jours. Quand je me suis enfin réveillée, j’ai dû prendre la pire décision de ma vie : avorter ou garder cet enfant. [soupir] À l’époque, il était hors de question que je le garde. Je me sentais comme dépossédée de mon corps. De ma vie. C’était un choix égoïste et immoral, mais je savais que je n’y survivrais pas.
Je marquai une pause, essuyant rageusement mes larmes. Ryan resta silencieux alors que son pouce dessinait des cercles sur la peau de mon bras. Un doux contact qui me rassurait. Qui m’ancrait dans l’instant présent.
― Ce bébé était innocent, mais moi aussi, putain ! Alors comment j’aurais pu imaginer le sentir grandir en moi ? Accepter de vivre avec le souvenir constant de cette nuit ?
Ma voix se brisa sous le poids des émotions que j’avais réprimées si longtemps.
― Mon père a profité de mon séjour à l’hôpital pour monter un dossier contre Éric. Il était déterminé à ce que je porte plainte, mais je ne voulais qu’une chose : qu’on me laisse oublier. Je n’ai pas mis les pieds au lycée pendant plus de six semaines après le retour des vacances. Je n’ai communiqué avec personne, alors je ne sais pas comment Charlène et Éric ont su pour le bébé. Mais ils ont fait de ma vie un enfer, me faisant passer pour une salope qui cherchait à piéger la famille Grant. J’ai supporté ça pendant près d’un mois. Chaque jour était une nouvelle humiliation, et j’ai fini par craquer. Un soir, je suis rentrée chez moi. Je suis montée directement dans la salle de bains et lorsque j’ai vu le rasoir de mon père sur le lavabo, j’ai su ce que je devais faire pour avoir enfin la paix. Pour que ça s’arrête.
Ryan se crispa derrière moi et il jura dans un soupir. Ses poings se refermèrent et je pouvais sentir la tension émaner de tout son corps.
― Mon père était arrivé juste à temps. Après ça, Charlène a été exclue. Sur l’une des vidéos de surveillance du lycée, on la voyait clairement coller des photos de moi nue dans les couloirs. C’est comme ça qu’elle s’est retrouvée ici, avec sa cousine.
― Et Éric ?
― Comme je n’ai pas porté plainte et qu’il n’y avait aucune preuve de son harcèlement, le lycée ne pouvait pas le virer. Et ils ne l’auraient pas fait. Son père dirige presque la ville avec son influence et son argent.
― Enfoiré !
― Ouais… J’ai fini par l’accepter. Mais je n’ai jamais remis les pieds au lycée. J’ai obtenu l’autorisation de finir l’année de chez moi et de passer les examens à domicile sous la surveillance de mon professeur d’informatique.
Texte de L. S. Martins.
Image par PublicDomainPictures de Pixabay : Lit D'Hôpital Civière Vieil - Photo gratuite sur Pixabay
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