Jeu de la fenêtre

         & Departure

Que cette musique est mélancolique !

De derrière la fenêtre, les mêmes choses à voir que d'ordinaire. Tant vues et revues que je ne les vois plus. Des grues à l'horizon, car ma ville a toujours été un vaste chantier.

Deux jeunes filles blanches à la même démarche, avançant à la même allure, même teinte de cheveux et même corpulence… Jean et blouson de cuir noir. Jumelles.

La musique tourne seule depuis YouTube. Accords tristes au piano. L'attaque des notes me fait penser que c'est le même musicien que celui de la musique imposée.

Un homme et une femme noirs avec tous deux un masque (bleu) sur le visage, accessoire de mode incontournable des prochaines saisons.

Un camion blanc descend la rue, suivi de deux voitures noires.

Plus bas, une citadine grise peine avec son créneau.

Les arbres et leur frondaison qui s'agitent sous le vent. Le vert tendre des feuilles nous fait accepter que le printemps est là, même si on ne l'a vécu que de derrière nos fenêtres ou dans de courts déplacements autorisés et attestés.

Le temps est à la pluie. Elle reste suspendue aux nuages gris, mais elle gronde.

À l'extrémité de mon champ de vision, la mosquée au toit vert-de-gris.

Au bout de ma journée, ce délicieux jeu. Ma main est crispée sur le stylo, je n'écris vraiment plus assez…

Un papillon de nuit s'agrippe à la rambarde du balcon. Ses ailes bougent au vent.

Mon vélo prend la poussière et la rouille.

…

Renise C. mai 2020