

Nous n'avions que la vie devant nous
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Nous n'avions que la vie devant nous
I - J’ai assisté à mon propre lever de vie, pas de quoi s’en émouvoir.
-
Dans l’antre de la Belle
Est-ce ainsi que la vie commence ?
Dans l’ombre d’un corps,
bercée par le bruit sourd
du palpitant d’une autre ?
Au temps où l’on savait écouter le cœur,
avant d’en avoir oublié la musique.
Est-ce ainsi que l’on vient au monde ?
Bout de chair, fruit de l’amour,
pas encore assez mûr
pour comprendre que, parfois,
l’amour ne fait pas bien les choses.
De l’amour peut bien naître la merde…
Comment aurais-je pu le savoir,
moi qui ignorais jusqu’à ma propre identité ?
Et alors que je flottais
dans le silence d’un océan sans lumière,
à l’abri d’un monde
dont je ne percevais que les murmures,
je ne songeais à rien.
Qu’il est bon de vivre sans pensées,
sans images ni souvenirs.
Qu’il est bon de vivre sans passé,
quand tout reste à découvrir.
Est-ce ainsi que l’on naît ?
Coquille vide
dans une boule à neige ambulante ?
Poisson amnésique
dans un aquarium aux vitres opaques,
ne nageant qu’en nous-mêmes,
suçotant nos petits doigts palmés,
nageoires déformées…
Est-ce ainsi que l’on est ?
Avons-nous connu d’autres mondes,
d’autres parfums, d’autres sons,
avant de n’être qu’embryons ?
Avons-nous goûté au ciel, piétiné les nuages ? Côtoyé d’étranges entités dématérialisées,
nourrices évanescentes
d’âmes en partance pour le grand éveil ?
Avons-nous vécu avant d’être ?
Qu’étions-nous avant l’antre de la Belle ? Qu’importe.
Qu’il est bon de vivre sans penser…
-
Lever de vie
Les premiers rayons perçaient à l’horizon,
aube d’un jour nouveau,
voyant éclore un bourgeon
déraciné de la nuit dont il avait fait son nid. Premier printemps et déjà le sang
perlant sur l’épiderme
comme une rosée matinale,
rouge ruisseau, rouge l’oiseau tombé du lit
dans un cri.
Hurlement,
comme un chant s’élève quand l’ancre se lève.
Et le front déposé sur ces lèvres.
Arraché au ventre de la mère
et jeté dans la gueule de la Terre.
Nouvelle victime d’une envie de donner la vie.
De se prendre pour des Dieux…
Et ainsi, à son tour,
l’astre enflammé assistait à l’éveil,
les derniers rayons quittant l’horizon,
aube d’une existence, nouvelle naissance.
-
Enre les mains de la Horde
Oyez oyez ! Damoiselles, Damoiseaux !
Les neuf coups ont résonné en ces murs,
il est temps de lever le rideau,
et de présenter la progéniture.
Comme il est beau, comme il est gros,
les yeux de son père, le nez de sa mère.
Ou bien est-ce l’inverse ?
Va savoir…
Se peut-il qu’il y ait un homme
dans le placard ?
Bouquet de fleurs de rigueur,
offrandes au jeune baigneur ;
cadeaux et photos,
éloges à débattre,
la chambre devient le théâtre
d’une pièce de piètre scénario.
Et tandis que se joue la scène des hypocrisies, l’acteur principal se fait la malle,
fixant la fenêtre de ses yeux embués,
carré de lumière qu’ils peinent à deviner.
Mais qu’importe l’endroit tant qu’il est ailleurs, loin des bras, loin des doigts
des « irre-spectateurs »
qui le scrutent et l’animent
comme un pantin de bois
en tirant sur des fils
qu’eux-mêmes ne voient pas.
Il arrive parfois qu’à trop jouer de sa corde
la marionnette s’échappe,
au plus loin de la Horde.
Hélas,
prisonnier de son corps engourdi,
l’évasion ne peut qu’être de l’esprit.
Fermant les paupières
comme on baisse le store,
le Prince grenouillère s’éloigne des pécores
qui s’enflamment et s’extasient
devant la discutable mignonnerie
d’un nouveau-né boudiné.
-
Animal
Pourquoi me regardes-tu ainsi,
assis au fond du lit, immobile.
Tes billes de plastique,
brillantes comme des étoiles filantes,
n’ont-elles rien de mieux à faire
que de dévisager mes chagrins infantiles ?
Oui je pleure.
Je pleure d’être né
et de ne savoir comment l’exprimer.
Je pleure d’avoir peur d’une ombre,
d’un simple bruit,
Je pleure d’avoir peur du silence de la nuit.
Je pleure d’avoir faim, d’avoir soif,
ou bien d’être oublié.
Je pleure d’avoir chaud, d’avoir froid
et de m’être oublié.
Oui je pleure.
Je pleure de pleurer.
Je pleure de crier.
Je pleure d’être observé
par un ours mal peigné,
assis au fond de mon lit,
de mon lit de bébé,
aux barreaux bien trop hauts
pour m’en échapper.
Enfermé dans la cage,
un animal sauvage coule ses larmes minuscules sous le regard immuable d’une bête ridicule.
Tu te dis ours,
mais tu n’as de féroce que le nom,
puisqu’en ton ventre
ne grondent que nuages de coton.
Moi j’ai le cœur qui bat
comme un tambour de guerre
et mes cris
réveilleraient tous les chiens de l’enfer.
-
Un pas ou deux, mais toujours de travers
Je cherche mon équilibre
sur un sol bancal.
Je tangue, chavire,
titube,
me casse la gueule.
Mes pieds sont bêtes comme eux-mêmes. Toujours vouloir être en tête,
compétition puérile.
Ils m'agacent, je m'emporte.
Je prends ma grosse voix
en les pointant du doigt.
Alors ils ne se dépassent plus,
demeurent côte à côte.
Et on reste plantés là,
on ne bouge pas.
En fait, marcher n'est pas si compliqué.
Faut juste les laisser faire,
un pas ou deux, mais toujours de travers.
-
Un été sans indien
Il n’est que peu de gens
ignorant la chaleur de l’été,
celle qui pousse à danser
pour faire, la pluie, tomber,
au son des tambours des indiens d’autrefois.
Ciel sans nuage, vent somnolant,
et le sable des plages devient ardent brasier
pour petons maladroits.
Si par malheur le bambin s’en va nus pieds
en quête d’aventures,
sans machette ni chaussure,
se perdre dans les mystères
d’un désert bordant la mer,
il se peut qu’il vous revienne changé.
Car la vie est ainsi,
elle fait peau rouge des visages pâles égarés,
qu’ils marchent à quatre pattes
ou qu’ils courent comme des chevaux sauvages,
le long du rivage.
Alors, sculptant châteaux,
à l’ombre d’un tipi ;
parasol déployé au-dessus de lui,
l’enfant dégourdi, blanc comme la lune,
n’aura rien accompli sans planter sa plume ; trésor abandonné par une mouette distraite,
au sommet de sa tour ornée de coquillages,
que l’écume des jours emportera au large.
-
Le cœur cerf-volant
Cesse de me retenir et laisse-moi m’envoler,
je n’ai pour avenir qu’un ciel étoilé.
Ne crains ni les nuages, ni le souffle du vent,
j’ai le cœur volage, je suis un cerf-volant.
Allez petit homme, inutile de pleurer,
il est un royaume qu’il me faut survoler.
Ouvre tes mains, mon garçon, il est temps,
j’ai le cœur papillon, je suis un cerf-volant.
Je suis fils de l’air, enfant du Céleste.
Je me ferai la Terre, l’univers et le reste.
Il te faut accepter, m’oublier à présent,
j’ai le cœur liberté, j’ai le cœur cerf-volant.
-
Du plomb dans la cervelle
Nous étions embusqués dans les hautes herbes, scrutant les moindres faits et gestes
de l’armée ennemie.
Les pieds dans la boue,
pataugeant dans la merde,
nous étions tous atteints du mal du pays.
Lorsqu’il m’arrivait de songer
aux retrouvailles tant espérées,
loin du champ de bataille,
avec ma bien-aimée,
j’avais le cœur lourd
mais battant comme jamais,
martelant comme un sourd
tandis que je rêvais
à ses bras, à sa peau, à ses doigts, à ses mots,
qui s’en viendraient panser mes blessures,
plaies ensanglantées de mon corps criblé
de plomb.
Et puis je rampais, en silence…
Fusil chargé, baïonnette fixée…
Paré à faire parler la poudre.
C’était pas ma guerre, mais il m’a obligé.
J’avais l’âge du coloriage,
de dompter le pastel,
de tremper le pinceau dans la gouache, l’aquarelle.
Mais mon dessein fut tout autre.
À qui la faute ?
Aux dirigeants ?
Au bon Dieu ?
À la putain de cathodique
qui diffuse à outrance des images de violence
à des mômes incapables de faire la différence entre réel et fiction,
et qui se croient militaires au milieu du salon, brandissant la kalash en plastique,
fidèle réplique, tout en sons et lumières,
et pointant le canon sur des soldats de plomb, parfaitement alignés pour être exécutés.
Le gamin, armé par ses pères, s’amuse à tuer ; simulacre de guerre.
Jeu à la con…
Dans quel cerveau malade
a germé l’idée de vendre à des gosses
flingues et mitrailles.
La mort n’a rien à foutre
dans les mains de la marmaille.
Mais où sont donc passés les châteaux de sable,
la pâte à modeler,
les briques de Lego,
les dessins abstraits qu’on aimante sur le frigo ? Que sont devenus les parents responsables ? Sont-ils morts pour de faux ?
De la main de leurs marmots ?
J’étais soldat d’alliage
et j’avais pour mission d’infiltrer les bas étages
des hauts dégradés,
histoire d’y laisser matière à penser ;
« Du plomb dans la cervelle »
comme le dit l’expression.
-
Dans l’ombre du coffre à jouets
Je me cache sous le lit,
derrière la porte entrouverte,
je me cache et observe à travers la fenêtre,
je me cache mais jamais je ne gagne à ce jeu.
On ne peut se cacher éternellement à ses yeux.
Je me cache et me crashe :
« Touché c’est toi le loup ! »
Un, deux, trois,
puis le ciel de la marelle devient flou.
Les pieds, dans l’élastique,
emmêlés,
je trébuche et m’affale sur les dalles.
Écorché,
j’enchaîne les défaites et cumule les plaies…
« L’important est de participer ! »
qu’ils disaient.
Je me cache sous le lit,
derrière la porte entrouverte,
je me cache et observe à travers la fenêtre.
Je me cache d’elle mais échoue à ce jeu,
on ne peut se soustraire bien longtemps
à ses yeux…
Je me cache de la vie car elle est malhonnête, mauvaise joueuse, tricheuse,
elle n’en fait qu’à sa tête.
Je me cache de la vie,
mais il n’est guère cachette
qu’elle ne saurait trouver,
si ce n’est dans l’ombre
d’un tout autre monde,
au fond du coffre à jouets.
-
Les fragiles Messagères
Que s'envolent bulles de savon,
jusqu'au jardin silen-cieux,
qu'elles les emportent vers l'horizon.
Que s'envolent bulles de savon,
et qu'elles racontent aux blancs cotons
les éclats de rires, les jours heureux.
Que s'envolent bulles de savon,
jusqu'au jardin silen-cieux.
-
Au bord du ciel
J’aimerais m’envoler…
« Impossible » disent les grands.
Les adultes ont tendance à brider les enfants.
Les grandes personnes pensent tout connaître, mais ils ne savent que déchirer les rêves.
J’aimerais m’envoler,
et qu’importe ce qu’ils soufflent,
je profiterai du vent
pour m’échapper du gouffre
au fond duquel les grands toisent le ciel
en battant de l’aile.
« J’aimerais m’envoler ! » que je leur dis…
Et alors ils rient.
Ils rient de mes bêtises, comme ils disent,
et se marrent de l’espoir.
Et moi je pleure un sourire pour faire bien,
un sourire de gamin, qui étouffe son chagrin.
« Va donc jouer au ballon
avec d’autres garçons !
Les ballons s’envolent
dans les cours d’écoles…»
Les ballons ne sont que de l’air en prison
dans lequel on frappe
pour je ne sais quelle raison…
Je me moque des ballons, des garçons,
des railleries…
Moi je veux m’envoler loin d’ici, c’est ainsi.
Alors dans le square, à deux pas de la maison,
je retrouve la grinçante balançoire.
Je m’assieds, puis recule,
je me lance et bascule,
me casse la gueule sous le tilleul,
la vie encore, la vie toujours…
Mais pas le temps de me cacher d’elle,
le vent m’attend.
Je bats des ailes et à nouveau je monte à bord,
au bord du ciel.
Je m’assieds, puis recule,
je me lance, et balance
en avant,
en arrière,
en avant,
en arrière,
plus haut,
plus haut,
en avant,
en arrière,
encore,
encore plus haut…
Le cœur ouvert et les yeux clos.
Je vais m’envoler…
Mais pris de vertige, je renonce
et m’inflige la caresse des ronces…
« Je voulais m’envoler…
— Et regarde où cela t’a mené,
cesse un peu de rêver,
ça risque de piquer… »
-
La Maison de Poufiasses
La nuit est tombée
et Lune impose sa lumière empruntée :
« Regardez-moi comme je brille sans la moindre flamme ! »
Se vante-t -elle de son tendre drame.
La Lune s’en fout apparemment
d’user de la lueur d’une étoile,
et le monde,
qui s’en moque tout autant,
semble trouver cela normal.
Le feu du Soleil peut brûler ce dernier,
il habille dame Lune d’une extrême beauté.
« Qu’il en soit ainsi, se dit-elle
si larme des uns fait l’âme des autres »
La tête tournée vers la fenêtre
aux rideaux mal cousus,
assise, inerte, dans le fauteuil en plastique,
une jeune femme,
quelque peu lunatique,
occupe sa nuit en rêveries décousues.
Le désastre des astres ne l’émeut guère,
elle qui n’a d’horizon
que les murs moroses de sa maison close.
Tapissées de silence,
les pièces endormies
perdent peu à peu souvenance
d’avoir connu la vie ;
au temps où « Tempête »
s’en venait foutre en l’air
garde-robe, mobilier, aliments de polymère,
la jeune femme n’avait guère le loisir
de réfléchir aux étrangetés de l’existence,
aux injustices et aux non-sens.
Mais la vie passe et l’enfant se lasse.
Le virtuel ne laisse que peu de place
aux maisons de poufiasses…
Traînant leurs plastiques superbes
comme un fardeau, une galère,
les poupées finissent toujours
par se faire voler la lumière.
« Qu’il en soit ainsi, se dit-elle, si,
dans ce monde obsédé par l’image,
aux modèles de beauté imposés des poupées succède le charme des LED. »
-
La corde aux coups
Pourquoi les filles sautent-elles
par-dessus la corde ?
Pourquoi s’imposer la douleur qu’elle inflige lorsqu’elle claque comme un fouet
sur la peau d’une sept piges,
incapable de voir qu’elle s’amuse d’un serpent,
et qu’un serpent sait mordre.
Pourquoi ne voient-elles pas les écailles
recouvrant entièrement l’instrument de torture. Un jouet ne devrait pas causer de blessure,
et pourtant.
Petite fille sanglotante se souviendra, je crois,
que les cordes ne sont pas faites pour amuser, mais pour nouer.
Nouer des liens bien trop serrés
pour s’en défaire.
Des liens qui lacèrent quand s’éteint la lumière…
Tu n’aurais pas dû te prendre au jeu.
Vous auriez pu vous allonger, tous les deux,
et regarder les nuages,
deviner les images qu’ils décrivent,
comme des messages qu’ils nous livrent…
À quoi bon se jeter dans l’arène,
endurer la peine et l’essoufflement
à pieds joints dans la gueule du nœud coulant
d’un lasso en mouvement.
Est-ce un jeu d’éviter de souffrir ?
Ne vaudrait-il pas mieux prévenir que guérir ?
Demande-toi à l’avenir,
au sujet de cette corde,
s’il ne serait pas plus sage de s’en passer
que de la passer…
-
Dans les poches des mioches
Les mains tu sais,
quand elles s’en vont au fond des poches,
ce n’est pas qu’elles soient moches
où qu’elles aient peur,
ni qu’elles cherchent un abri
pour se cacher de la vie.
Les mains sont des pirates
et les poches, des plages
qu’elles creusent à coup de pioche,
pour y enfouir leur butin.
Les poches contiennent mille trésors de mioches.
Dans le secret des miennes,
traînent quelqu’affûtiaux ramassés en chemin. Quand l’automne s’amène,
il balance à outrance tant et tant de richesses,
que les chercheurs d’or,
bien qu’encore gamins,
les recherchent et s’empressent
d’en avoir plein les mains.
Qu’importe qu’elles saignent de s’être battues,
tant qu’elles gardent en paumes
les reliques disparues
d’autres royaumes,
de ceux auxquels les grands ne croient plus.
Dans mes poches de mioche un peu moche, s’entassent des trésors
que l’on me reproche de garder secret.
Il semble que caillasses, glands et billes d’agates soient bien plus à leur place,
rangés dans une boîte,
qu’à faire des tours dans le tambour
d’une machine à laver…
-
J’irai m’allonger sous l’Arbre Lumière
Lorsque les saisons s’en seront retournées
sous les jupons de mère Nature,
laissant à l’hiver
le soin d’imposer sa vision du monde,
j’irai m’allonger sous le conifère
recouvert de dorures,
et, dansant avec mes rêves au bal des lumières, j’oublierai les ombres,
ces restes de nuits
refusant le règne de l’astre de feu,
quand, au plus haut des cieux,
ce dernier tente en vain d’illuminer la vie.
La vie, de jour comme de nuit,
est emplie de noirceur,
que Soleil et Lune,
quand bien même réunis, ne sauraient dissiper.
Puisque les astres, impuissants, demeurent,
que reste-t-il aux hommes,
si ce n’est s’évader,
emportés par le ballet hypnotique
des guirlandes électriques.
Voilà pourquoi,
lorsque les saisons s’en retourneront
sous les jupons de leur mère,
j’irai m’allonger sous l’Arbre Lumière,
rêver un peu, oublier les ombres,
rêver pour mieux oublier le monde…
-
Guirlande d’étoiles
Clignotantes ou scintillantes,
elles habillent les ramures
de parures étincelantes,
et chassent l’obscur,
en singeant les lueurs
de leurs sœurs des Hauteurs…
Les lumières de Noël
sont étoiles hors du ciel.
-
Les larmes givrées du Bonhomme enneigé
Le ciel tombe sa neige sur la ville endormie.
C’est l’hiver qui assiège quand le froid s’ennuie.
Esprit de conquête et de domination ;
recouvrir la planète d’un blanc de coton.
Le ciel pleure des larmes de givre,
et personne n’est là pour lui prêter l’épaule,
pour éponger son cœur lassé de vivre
au temps des regards rivés vers le sol.
Le ciel fait la gueule, comment le blâmer,
lui qui s’habille d’étoiles
pour des êtres aveuglés.
Alors il dégueule, forcément, le pauvre !
Comme je pisse dans mon froc
pour me faire remarquer.
Le ciel chiale des perles glacées
dans l’indifférence,
et impose au bitume la couleur de l’enfance ; virginité, innocence, pureté,
saupoudrées sur les toits et les routes…
Poussière de lumière dans un écrin qui goutte.
Le ciel tombe sa neige sur la ville endormie.
C’est ainsi qu’il protège des torrents de pluie qui, avec le temps, font des anciens printemps
des piétineurs de pleurs, des salisseurs de blanc.
Le ciel peut bien s’habiller de gris
et ensevelir le monde, si le cœur lui en dit,
je m’en irai demain, au milieu du jardin
faire bonhomme de neige du céleste chagrin.
-
L’offense aux santons
Le papier froissé, faisant office de montagne,
est à peine posé
que déjà se pressent les santons.
Bœuf, âne, chameaux et moutons
côtoient Rois mages, anges, bergers
autour d’un berceau de paille encore inoccupé. Nous ajoutons les parents
et quelques invités anachroniques,
tout en essayant de ne rien déchirer.
Trop tard…
La maladresse n’a cure du biblique,
nous cacherons la fissure
sous les flocons synthétiques…
La crèche prend vie sous le sapin décoré,
devant la marmaille qui braille
pour être preum’s à vaporiser la fausse neige
sur la tronche du divin nouveau-né.
Le respect des convenances
hélas, n’est pas de mise,
au grand dam de grand-mère
qui fustige nos bêtises :
« Génération perdue,
possédée par le diable,
passera sa vie
à rouler sous la table… »
À la nuit tombée,
les ainés, de mèche avec les grands,
déposeront, au pied du village déchiré,
les paquets que les plus jeunes,
au matin,
ouvriront avec entrain,
sous le regard réprobateur
de l’aïeule scandalisée
qu’en lieu et place du p’tit seigneur
sommeille un troll ébouriffé.
-
Le cerisier est en fleur
Bruissent les feuilles, craquent les branches,
tel est le chant du Cerisier
lorsque la bise se brise et flanche
entre ses ramures ornées
de parures immaculées.
Le Cerisier est en fleur,
y a du printemps dessous l’écorce.
Le Cerisier a fleuri de toutes ses forces…
-
Rat débile au ras des champs
Derrière la vitre, défile le paysage
sans jamais dépasser la vitesse autorisée.
Au gré des virages et des voies sans issue, succèdent aux villages des terres inconnues.
La radio grésille les quelques stations
qu’elle parvient à capter.
Dans l’trou du cul du monde,
il arrive que les ondes peinent à s’orienter.
Moi, je fixe le film
tout en imaginant un hérisson bleu
éviter comme il peut de se faire rattraper
par le bord de l’écran…
Alors sautant par-dessus maisons et clôtures, esquivant les murs, pour rester en vie,
la drôle de bestiole, libérée des pixels,
m’emporte avec elle dans sa course folle,
loin du siège auto de la vieille Fuego.
Trop de jeux vidéo ?
Et alors…
Ne vaut-il pas mieux s’amuser
d’un rat débile au ras des champs,
qu’écouter les fadaises de parents égarés,
aussi bien sur cette route
que dans leur couple
qui doute de s’être, un jour, aimé…
-
J’veux pas grandir
J’veux pas grandir, jamais.
J’veux pas devenir une grande personne.
J’veux pas r’garder le monde de haut
comme s’il m’appartenait.
J’veux pas le piétiner de mes grands pieds.
Les grands souliers ne sont bons
qu’à écraser les horizons…
J’veux pas grandir, grandir c’est nul,
c’est comme vieillir, c’est ridicule.
J’veux pas grandir, j’veux pas vieillir,
parce qu’après on doit partir.
Et moi, bah! J’veux rester,
j’ai pas encore tout vu, pas encore tout fait.
J’veux découvrir ce qui se cache
derrière les murs
sans pour autant les enjamber.
J’veux ramper dans les fissures,
escalader, contourner,
prendre le temps,
pas survoler.
J’veux goûter l’eau des rivières
et m’y baigner,
et p’t’être aussi un peu la mer,
mais j’aime pas trop quand c’est salé.
J’préfère le sucre, l’acidulé,
j’aime quand ça pique,
qu’ça fait pleurer,
mais pour de faux.
J’aime pas pleurer, pleurer c’est nul,
c’est comme grandir, c’est ridicule.
Les grandes personnes, elles pleurent jamais,
ou alors elles font semblant.
Les larmes qu’elles coulent
sont celles de leur enfant.
Celui qui demeure au cœur malgré le temps.
Celui qu’elles voulaient être éternellement,
mais qu’elles ont oublié.
Les grandes personnes oublient souvent
qu’elles étaient comme moi avant.
Des enfants
qui n’voulaient pas devenir grands…
-
Les goûts et les couleurs
Dimanche matin,
réveil matinal,
p’tit déj en tête à tête.
Silencieux,
je rêvasse
devant mon bol de céréales,
tandis qu’Il vide sa tasse à peine remplie
d’un café dégueulasse plus noir que la nuit.
Habillé comme la veille et l’épi indompté,
nous quittons la maison.
Dehors, le soleil s’éveille,
et balance ses rayons par-delà l’horizon.
Les portières claquent
et dans l’habitacle
demeure l’odeur des prises de la veille.
Ça pue la poiscaille et l’humidité,
effluves tenaces
que le sapin du rétro ne saurait masquer.
La bagnole démarre
sur les notes de guitare du taulier,
album des 50 ans, parc des princes 93,
« C’est un chanteur abandonné… »
J’aurai préféré le Rouge-gorge
et son « aquarium »
j’me sens plus scaphandrier
en quête d’un trésor planqué
sous les cailloux bariolés qu’j’ai en poche.
Les goûts et les couleurs…
Ici, point de poésie chantée,
ça cri de bon cœur,
ça vient scander la qualité des produits frais.
Fruits et légumes, viandes et poissons…
« Bonjour messieurs !
Qu’est-ce qu’il vous faut ?
Avec ceci ?
Y a 3 kilos !
Encore un peu ?
Bien sûr messieurs !
Je vous r’mercie !
Bon appétit ! »
Bien emballés dans le sac plastique,
oignions, poivrons et champignons,
quelques plantes aromatiques,
rumstecks, filet mignon…
Au fond des poches des grands
y a des trésors bien différents
que ceux qui traînent au fond des miennes…
Je marche derrière,
à travers les méandres du Marché.
Bousculé parce que trop petit
pour être vu dans la cohue,
j’essaye de le suivre, mais je dérive,
Rêveur parmi les coureurs.
Les goûts et les couleurs…
Dimanche matin, fin de matinée,
à nouveau en tête à tête.
Silencieux,
je m’affaire à boulotter
le sucre perlé des chouquettes.
« Bonjour messieurs !
Qu’est-ce que ce s’ra ?
Comme d’habitude ?
On fait comme ça ! »
Alors,
attablés dans un coin du bistrot,
je rêvasse à nouveau
devant la valse des bulles
d’un diabolo grenadine
tandis qu’il vide sa chopine,
fraîchement remplie
d’un liquide dégoutant,
rouge comme le sang.
Les goûts et les couleurs…
-
L’enfant Lune
Maman est pleine comme la Lune.
Paraît qu’un autre cœur bat en elle,
un autre palpitant que le mien,
au temps où j’écoutais le sien.
J’en ai fait du chemin depuis mon lever de vie.
J’ai appris à marcher avant de savoir tomber
et même à pleurer avant d’avoir mal.
L’eau a coulé sous les ponts, au gré des saisons,
et nous voici à l’aube d’une existence,
nouvelle naissance.
Mais pourquoi faire, je vous le demande ?
À quoi bon récidiver, ne suis-je pas suffisant ?
Ne puis-je, à moi seul, combler le néant
qu’ils essayent de remplir
en obligeant encore le corps à souffrir ?
Maman est pleine comme la Lune,
regardez-la !
Légère comme une plume, la voici enclume trainant comme elle peut son surpoids.
Je l’aimais croissant, gibbeuse ou demi,
mais voilà qu’elle peine d’être pleine de vie.
Les grandes personnes accumulent les erreurs, ensuite ils s’étonnent
quand leur tombe un malheur,
comme feuilles en automne.
Moi j’ai l’hiver au cœur
de ne plus être l’unique,
glacé par la peur du destin tragique
d’être mis de côté, remplacé, oublié…
Fils de printemps ou fils d’été,
tous les enfants sont condamnés
à devenir grand, un jour ou l’autre,
tous les enfants sont comme les vôtres.
Même cet alien qui,
dans sa chrysalide charnelle,
suçote ses immondes tentacules.
Tous les enfants sont ridicules.
Dans quelques jours,
l’enfant Lune arraché à la nuit,
de son lever de vie,
subira la lumière,
me poussant hors du monde,
m’exilant dans l’ombre
de la face cachée du désastre lunaire.
-
Les liens du sang
Et que veux-tu que je te dise, j’étais là avant ! Telle est la loi des liens du sang ; priorité au premier de cordée. C’est moi qui grimpe et tu me suis, harnaché au mousqueton de mon jogging à pression que des couillons se plaisent à déboutonner pour mettre en lumière mes guiboles blanches comme un cul d’albinos vautré dans la neige. Où je vais, tu viens. Ce que je fais, tu le tentes. Et, bien entendu, après mes conneries, tu te dénonces sans tarder. Les règles sont claires, alors ne vas pas t’imaginer la moindre marge de manœuvre. Je serai intransigeant ! Telle est la loi des liens du sang ; l’assujettissement du cadet.
L’aîné avait, a et aura toujours raison, d’autant que, pour filer la métaphore de la varappe, si je tombe, tu tombes avec moi, alors que si tu glisses en loupant ta prise, tu peux être sûr que je te ramène fissa contre la paroi avant que le vertige n'ait eu le temps de souiller ton short pastel et tes méduses à paillettes.
Désolé frangin, mais nous n’avons pas l’âge du magasinage, et mère semble s’amuser des déguisements qu’elle nous oblige à porter.
Leçon n°1 : les parents se moquent de l’image sociale de leurs rejetons.
Leçon n°2 : les parents se moquent de leurs rejetons…
Leçon n°3 : l’aîné avait, a et aura toujours raison.
-
Ils s’en iront sans nous
Il s’en est allé un après-midi de juillet,
jour de fête nationale, tu parles
rien à célébrer.
Il s’en est allé, de plein fouet, percuté
par un putain d’camion,
comme disait la chanson.
Il s’en est allé, laissant sur le quai
les amis, les enfants, la famille…
À l’heure du grand voyage
au royaume des ombres,
il n’est point de bagages
dont les âmes s’encombrent.
Il s’en est allé, c’est ainsi
et qu’importe que les cœurs en pluie
l’escortent vers le paradis,
si tant est qu’il existe.
Il s’en est allé, comme tant d’autres avant lui.
Il s’en est allé et moi, pour la première fois,
je découvre la joie d’être triste.
Quand le corps s'effondre,
submergé par la montée des eaux
qui ruissellent sous paupières fermées
à se les faire saigner,
parce que l’on refuse de voir
ce qui crève les yeux,
que parfois les cauchemars survivent à l’éveil,
et que le ciel aura beau s’habiller de bleu,
il demeure, pour le cœur,
sombre
comme un jour sans soleil.
Le chagrin nous remplit,
le chagrin nous enivre,
au goulot de l'eau de vie,
le chagrin nous dérive.
Naufragés survivants, éplorés sur la grève,
quelque peu honteux
d'être de ceux qui se relèvent
quand tant d'autres tombent
par la faux, par le glaive.
Enfermés dans l’écrin du chagrin,
point de jour ni de nuit.
Le balancier se fige
tandis que les aiguilles
nous injectent le sable du temps,
qu'il s'égrène dans nos veines
comme un compte à rebours angoissant.
Nous nous reverrons bientôt,
dans une heure,
dans un mois
dans un an.
Dans un siècle ...
Comment explique-t-on la mort à l’enfant ?
L’enfant que je suis
et qui riait encore avec lui,
il n'y a pas si longtemps ;
cet homme que j’aimais comme un père.
Quand j’y pense aujourd’hui,
je maudis la faucheuse d’emporter, toujours,
ceux qui puent l’amour
et de laisser sur place ceux dont on se passe…
Il s’en est allé, comme tant d’autres avant lui.
Et d’autres suivront,
sans rien dire, sans prévenir.
Les gens qu’on aime, quoi qu’il advienne, demeurent au cœur, un point c’est tout.
Mais souviens-toi qu’un jour ou l’autre,
ils s’en iront sans nous.
-
Laisser chagrin frôler l’ivoire
Je pose phalanges pour la première fois
sur les touches du Bontempi.
La mélodie ne vaut rien
et les accords sont vains.
Les notes se suivent et dérivent
dans une belle cacophonie,
mais sur les blanches comme sur les noires
je laisse chagrin frôler l’ivoire.
‘’Ils s’en iront sans nous…’’
Je ferme les yeux et pose un doigt en La,
un autre en Do, un autre en Mi
et je martèle plusieurs fois
cette première harmonie.
Je réitère en Si,
et puis enchaîne en Fa
tout en laissant quelques maladresses
venir saigner les tympans de l’auditoire.
Mon public fantasmé
ne m’en tiendra pas rigueur,
pas du genre à gueuler pour de simples erreurs.
Je vais et viens,
d’une seule main,
d’un La mineur,
Si,
Fa,
et puis revient,
comme un refrain.
De ma droite,
je tente quelques approximations
qui me paraissent écoutables.
Premier morceau, dans cette chambre bleue, porte et fenêtre fermées,
et pourtant je sens le froid s’infiltrer
sous ma chemise froissée.
Je ne sais rien de la musique,
et ne connais du solfège
que les bases enseignées par cette prof
que je suis seul à entendre,
lorsque les flutistes en herbe
oublient de s’écouter.
Je ne suis pas un musicien.
Juste un gamin à larme blanche
broyant du noir,
laissant chagrin frôler l’ivoire.
-
La maison oubliée
Les fenêtres brisées s’ouvrent sur le vague d’un terrain en friche. La porte dégondée gît sur le sol, peinture écaillée et poignée rouillée. La vie semble avoir quitté les lieux, les fissures sont seules à courir le long des murs.
À l’intérieur, les pièces sont vides. Les meubles et les souvenirs ont été emportés depuis suffisamment longtemps pour que moisissures et poussière atténuent les décolorations inhérentes à la présence d’objets quelconques. Spectre de l’absence qui nous souffle ces quelques mots :
« Tiens ! Il devait y avoir un tableau juste ici… et un tapis juste là… »
La tapisserie se déchire et le bois gondole, tout ici n’est que lambeaux. La maison oubliée, autrefois pleine de joie, est devenue tombeau.
Nous empruntons l’escalier grinçant, la peur au ventre qu’une marche se brise et nous emporte, ou qu’une main agrippe nos chevilles pour nous garder prisonniers dans la cave, enchainés au radiateur froid comme la mort. Il n’en sera rien…
À l’étage, même les moins pieux d’entre nous prient pour que le sol ne se dérobe sous notre poids. Je ferme la marche, convaincu que le danger frappe toujours par-derrière. Rien à voir avec le courage, je suis juste plus lent que les autres. Je ne suis ni grimpeur, ni nageur, ni coureur, je ne suis pas de ceux qui ont la gagne au cœur…
Les autres garçons n’ont qu’une idée en tête ; balancer pétards et claques-doigts aux quatre coins de la maison, que détonations résonnent et réveillent les fantômes en sommeil. Moi, je reste en retrait. Rien à voir avec la couardise, je suis juste plus amoureux que les autres.
Je ne suis qu’un rêveur avec une fille au cœur…
Nous nous observons tous deux en cherchant dans les yeux de l’autre le cran qui nous fait défaut. Un lien semble se tisser, l’espace d’un battement de paupières. J’ignore quels esprits hantent ces lieux, mais je sais qu’en cas de contact, n’ayant aucun positroneur désintégrant sous la main, je serai le premier à me faire engluer, parce que trop lent, évidemment.
Une explosion me sort de mes pensées.
Le lien s’est brisé, elle détourne le regard, les gars se marrent, un chien aboie, un volet claque, le vent se lève, le plancher grince, le ciel s’assombrit… et elle s’agrippe au bras d’un autre.
-
Nous courions dans les dunes en attendant la nuit
Nous étions des enfants,
des gosses innocents
à qui l’on avait imposé la vie.
Nés d’un désir que je ne saurais expliquer,
de se faire plaisir, de procréer,
d’avoir une bouche à nourrir,
un être à s’occuper,
comme quand on s’achète un chien,
un chat, un animal de compagnie
dans une animalerie…
Ça n’existe pas les animaleries de mômes ;
les gamineries ?
Alors on ‘’fabrique maison’’
des minions qu’on dépose sans gêne
dans l’arène de la vie,
pour qu’ils y mènent des combats,
qu’ils y apprennent la défaite,
la victoire,
la douleur et la gloire…
Comme des piafs,
qu’on prive de ciel
pour les barreaux d’une cage
au sol recouvert de papier journal.
Mais rien d’anormal
puisqu’il en est ainsi depuis des Lunes,
pas de quoi s’arracher les plumes.
Nous étions des enfants,
nés d’un coup de rein,
conçus au creux des hanches,
prisonniers d’une épinette
qu’ils appellent ‘’maison’’,
elle-même détenue dans une bulle d'air,
qu’ils appellent la Terre.
Cette manie de donner des noms
à tort et à travers ;
Terre ou maison,
cage ou prison,
c’est du pareil au même,
on ne peut en sortir indemne.
Alors pour feindre l’évasion,
les enfants, qu’en ce temps nous étions, s’émerveillaient de peu,
et sans raison.
Nous sautions dans les flaques
et gueulions à tue-tête
en évitant les claques
des adultes malhonnêtes
de nous reprocher de faire aujourd’hui
ce qu’hier ils faisaient aussi.
Nous jouions,
nous dansions,
nous rêvions et puis,
nous courions dans les dunes
en attendant la nuit…
-
Dormir sous les combles
Dormir sous les combles c’est comme avoir la voûte céleste pour couverture.
C’est, chaque nuit, s’allonger de travers et fixer la Lune sous la fenêtre de toit, rêver dans ses bras quand Morphée se tire endormir je ne sais qui, je ne sais où.
C’est regarder la pluie tomber sur le hublot, la neige jouer le rideau, la grêle marteler le carreau.
C’est voir passer les saisons sans quitter sa couche, admirer le ballet des nuages ;
paréid’au lit.
Dormir sous les combles c’est prendre de la hauteur sur les grands, bien moins grands qu’ils ne l’étaient avant.
C’est une cabane de solitude, un abri bas de plafond.
C’est la bonne altitude pour aimer l’horizon.
Dormir sous les combles c'est respirer poussière d'étoiles et toucher l'espace du bout des songes.
C'est mettre les voiles sous les draps d'un tapis volant sur lequel on s'allonge.
C'est le vertige d'être l’oiseau dans son nid, sur la plus haute branche de l'arbre de vie.
Mais dormir ainsi, ici, la nuit, c'est aussi, pour être honnête, se casser la gueule en allant aux toilettes.
-
La dernière balançoire
Maintes fois j'ai glissé sur des toboggans,
à l'endroit, à l'envers, la tête la première...
Les cabanes, les tape-culs des jardins d'enfants, n'ont à présent, pour moi,
plus le moindre mystère.
J'ai essayé, plus d’une fois, de voler
et je suis, plus d’une fois, tombé
dans les ronces.
J’ai appris le vélo, ici, avec Lui,
dans le square du haut de la butte,
j’ai appris l’équilibre et j’ai appris les chutes.
Un cache-cache dans un buisson épineux
ça laisse des traces, c’est malheureux,
comme les souvenirs des jours heureux.
Balades dominicales, parties de pétanque,
je me souviens…
Le goût de papier journal
qu’avaient les pignes de pomme de pin.
Si vous vous demandiez la saveur de la presse,
les quotidiens ont le parfum des pignons de pin.
Je me souviens sa main dans mon dos
me donnant l’impulsion nécessaire
pour fendre l’air à vélo.
Je me souviens des bosses, des montées,
des descentes…
Je me souviens avoir oublié les freins.
Je me souviens le mur, le chagrin,
l’écorchure au genou
bien moins profonde
que la blessure à l’amour-propre.
Je me souviens ses mots ;
« C’est rien, relève-toi, t’en verra d’autres ! »
Je me souviens de Lui, de celui qu’Il était,
je me souviens du square du haut de la butte,
j’ai appris à l’aimer, et j’ai appris la chute… Attends un peu que je décolle,
il commence à faire noir,
avant que tout ne s’envole,
une dernière balançoire…
-
Dis Papa, c’est quand qu’on rigole
J’me suis encore vautré sur le bitume ‘’réalité’’.
J’ai les deux genoux qui saignent
et les paumes écorchées…
Alors c’est ça la vie ?
J’me suis pris en pleine face le retour de bâton.
Sûr que ça laisse des traces
en plein milieu du front…
Dis, c’est vraiment ça la vie ?
J’me suis relevé sans pleurer
comme Tu m’as appris
‘’Un garçon ça chiale pas !
Un homme ça survit…’’
Dis-moi, c’est ça la vie ?
J’me suis juste excusé de mon inattention
j’n’aurais pas dû rêver
d’un nouvel horizon…
Mais dis, est-ce que c’est ça la vie ?
J’me suis encore heurté à ton silence
j’ai l’cœur qui pleure
mais quelle différence ?
Puisque c’est ça la vie.
Des hauts pas très hauts
et des bas bien trop bas,
des questions sans réponses,
des plaies qui n’guérissent pas.
Alors Papa, la vie c’est donc ça ?
Tu disais :
‘’tu verras comme la vie peut être folle,
qu’importe si parfois le cœur dégringole !’’
Alors dis-moi Papa, c’est quand qu’on rigole ?
-
Et puis l’on grandit
Lorsque l’on est enfant,
et que l’on traîne sa bedaine au ras du sol,
on n’attend pas grand-chose de la vie.
Manger, boire, dormir semble suffisant,
on se contente de ramper de traviole.
Et puis l’on grandit…
Alors, cowboys minuscules
aux jambes arquées
d’avoir trop chevauché le poney à bascule,
nous cheminons, plus ou moins d
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