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CHAPITRE 5

CHAPITRE 5

Publicado el 6, sept, 2025 Actualizado 6, sept, 2025 Paranormal romance
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CHAPITRE 5

Le soleil de l'après-midi filtrait à travers les frondaisons, jetant des éclats d'or sur le capot de la voiture. Le centre de Paimpont s'éloignait lentement dans le rétroviseur, avec ses terrasses animées, ses promeneurs curieux, et cette vibration étrange dans l'air, une tension qu'Arthur sentait encore résonner dans son corps.

Assis côté passager, il n'avait pas prononcé un mot depuis leur départ. Son regard glissait au-delà du pare-brise, opaque. Elizabeth, au volant, gardait le silence. Son maintien était droit, maîtrisé. Seule la raideur de sa nuque trahissait quelque chose. De l'agacement. C'était certain.

La forêt approchait à nouveau, refermant son ombre sur eux.

— Tu es bien silencieux, lança-t-elle soudain, sa voix plus basse qu'à l'accoutumée. Qu'est-ce qu'il s'est passé, là-bas ?

Il tourna lentement la tête vers elle.

— Rien. Un ado touriste en ville. Et les filles de mon lycée sont... en chaleur.

— Arthur. Un peu de tenue. Depuis quand utilises-tu ce genre de vocabulaire ?

Il haussa les épaules, sans répondre. Un silence s'installa. Elle gardait les yeux rivés sur la route, son profil immobile.

— Donc... un garçon, dit-elle enfin, d'un ton qu'il ne sut pas décrypter.

Il ne répondit pas. Le souvenir d’Esteban s’invita dans son esprit. Ce corps, cette intensité, cette présence troublante qui vibrait sous la peau… Cela lui nouait la gorge.

Elizabeth inspira à peine, imperceptible, puis murmura, pour elle autant que pour lui :

— J’espère qu’il n’a pas réveillé ce… ce genre de trouble.

Arthur ferma les yeux.

La Faim.

Les souvenirs remontèrent, acides, brûlants, souvenirs d’une Amérique trop vaste, trop libre, où il s’était perdu.

Dans les années soixante-dix, l’Europe s’était rétrécie. Trop de rumeurs, trop de disparitions, trop de chasseurs. Elizabeth avait su lire les signes. Le monde changeait. Les contrôles, les registres, les identités croisées. Alors elle avait décidé de partir.

L’Amérique offrait des routes sans fin, des villes anonymes, des foules indifférentes. Un terrain de jeu idéal pour se faire oublier.

Arthur ne protesta pas — il ne s'était jamais risqué. Carmilla, elle, s'en réjouit. L'excès, la démesure : l'Amérique promettait tout. Et Will, fidèle, suivit comme il l'avait toujours fait depuis sa transformation, majordome immortel au service d'un secret plus vaste que lui.

Au début, la chasse resta mesurée. Elizabeth imposait son code : pas de victimes inutiles, pas de traces, pas d'attention. Régner dans l'ombre exigeait de rester invisible. Will gérait les identités, les réservations, les déplacements avec la précision d'un maître d'échecs.

Mais l'Amérique n'était pas l'Europe. Là-bas, tout appelait à l'excès. Les routes désertes, les motels anonymes, les festivals où disparaître passait inaperçu...

Arthur céda.

Lui qui avait toujours chassé jusque-là avec la froide discipline d'un chevalier, perdit la tête. Peu à peu, le sang devint plus qu'un besoin. Un vertige. Une chaleur dévorante qui lui brûlait la poitrine. La Faim s'était muée en drogue. Sa drogue. Chaque victime n'était plus qu'un nouveau shot, plus fort, plus exaltant que le précédent.

Elizabeth le voyait sombrer, la colère glacée. Carmilla observait, fascinée par la chute, comme un fauve contemplant un rival en train de se consumer. Will effaçait, payait, nettoyait, sans un mot.

Jusqu'au matin où Elizabeth le trouva dans une chambre d'hôtel. Draps poisseux de sang séché. Deux corps encore tièdes. Arthur allongé entre eux, le regard vide, incapable de réagir aux rayons du soleil qui lui brûlaient déjà la peau.

Un roi abattu sur un trône de cadavres. Un prince déchu.

Will, debout près de la porte, gardait les yeux baissés. Lui aussi savait : ils avaient touché le fond.

Elizabeth décida de rentrer. L'Amérique les avait détruits. Arthur surtout. Il n'était plus qu'un gouffre insatiable, un danger pour tous.

De retour en Europe, Elizabeth pris la tête d'un hôpital au milieu de la Bretagne, et mit en place son réseau de poches de sang. Un pis-aller qu'elle avait toujours méprisé, mais nécessaire. Carmilla s'en accommoda, tout en continuant à chasser à l'occasion. Quant à Arthur, il adopta cette sobriété tel une nouvelle pénitence. Il n'avait plus confiance en lui. Ancien camé d'hémoglobine, il préférait désormais la fadeur du sang tiède en poche qu'à la folie qui battait encore sous ses côtes.

Et Will reprit sa fonction première : préparer, servir, nettoyer. Mais il n'eut plus jamais à couvrir de massacres.

Arthur rouvrit les yeux sur le vert sombre de Brocéliande.

— Non. Bien sur que non, souffla-t-il. Ce n'est pas ça.

Elizabeth ne répondit rien. Son profil resta figé, lisse, impénétrable.

Arthur détourna le regard vers la route. Un frisson lui parcourut la nuque.

Il détourna le regard vers la route, mais la tension persistait. Ce n’était pas la Faim. C’était autre chose. Quelque chose de vivant. D’incontrôlable.

Et cela, plus que tout, lui faisait peur.


Le château apparut entre les arbres. Dès que la voiture franchit les grilles, Arthur descendit sans un mot et disparut dans les escaliers menant à sa chambre. Il avait besoin de s’éloigner, de réfléchir, de retrouver le silence. Ce silence où ses pensées s’étiraient sans limite… et où ses raisonnements finissaient par s’égarer.

Depuis sa chambre, il entendait les talons d’Elizabeth résonner au rez-de-chaussée. Elle s’était enfermée dans son bureau. Les vieux planchers du manoir laissaient filtrer les sons : le claquement sec d’un dossier, le froissement nerveux de papiers. Elle triait sans doute des documents de sa clinique, son éternelle manie de tout contrôler.

Mais cet après-midi, quelque chose sonnait faux. Une crispation inhabituelle, perceptible dans le rythme de ses gestes. Arthur n’avait pas besoin de confirmation : son rendez-vous à la banque s’était mal passé. Il le savait, sans qu’elle prononce un mot.

Un courant d’air s’engouffra dans le manoir. Une porte claqua.

Arthur n’eut pas besoin de tendre l’oreille pour reconnaître l’odeur : Carmilla. Il s’approcha du rebord de la fenêtre. De là, leurs voix lui parvenaient plus distinctement.

— Te voilà, lança Elizabeth.

— Oui… Ça a été plus long que prévu… Et toi, ton rendez-vous s’est bien passé ?

Il imagina sans mal le sourire moqueur de Carmilla.

Un dossier fut refermé sèchement.

— Un conseiller trop curieux. Et Arthur n’a pas été des plus coopératifs cet après-midi.

Arthur soupira en s’adossant au mur. Il ne savait jamais s’il préférait qu’on parle de lui en bien ou en mal. Mais il savait qu’il détestait qu’on parle de lui. Point.

— Je te rappelle qu’il nous fait une énième crise d’adolescence.

Leur relation était… complexe. Depuis son retour au lycée, qu’il avait expressément exigé, Arthur semblait revivre une adolescence qu’il n’avait jamais eue. Il se calquait malgré lui sur ces humains bruyants et fragiles, oscillant entre mépris et fascination. Elizabeth et Carmilla devaient composer avec ses humeurs, ses silences, ses éclats.

Lorsqu’il était chevalier — un titre déjà anachronique au XVIIᵉ siècle — il n’avait pas eu le loisir d’être jeune. À dix-huit ans, il portait déjà les armoiries de sa lignée, celle de Lancelot du Lac. Son ancêtre. Son fardeau. L’homme qui avait trahi Arthur Pendragon pour une femme, le roi qu’il servait. Et lui, aujourd’hui, portait le nom de ce roi. Elizabeth avait goûté à cette ironie lorsqu’elle l’avait mordu, le condamnant à porter, pour l’éternité, le nom du roi que son ancêtre avait trahi.

— Il a fait une rencontre qui semble le perturber au plus haut point, poursuivit Elizabeth. Je le sens…

Arthur sentit une lourdeur écraser sa poitrine. Un étau invisible lui serrait la gorge. Son sang figé semblait circuler de nouveau, traçant dans ses veines un feu froid. Ce trouble en lui, violent et profond, aurait suffi à ranimer ce cœur mort, éveillant une douleur étrange, pesante, fascinante.

— Un humain. Un jeune homme. D’après lui, un touriste…

Le silence qui suivit pesa comme un glas.

— Tu crois qu’il pourrait… réveiller sa « Faim » ? demanda Carmilla, la voix soudain plus grave.

Au mot « Faim », Arthur se détourna brusquement de la fenêtre. Il s’assit lourdement à son bureau, la tête entre les mains.

— Non… Je ne veux plus ressentir ça. Et puis… ce n’est pas ça, murmura-t-il.

Il resta immobile, les yeux clos. Il savait pourtant une chose : quelque chose s’était réveillé en lui, ce jour-là, sur cette place. Il ignorait ce que c’était. Mais dans quelques jours, cet Esteban repartirait dans sa région. Et tout cela se tairait.


La grande horloge du château sonna, brisant le cocon de silence où Arthur s’était réfugié. Il se leva lentement, quitta sa chambre et entama la descente. Sous ses pas, le vieux parquet gémit à chaque marche. Le manoir, noyé dans l’ombre du soir, paraissait s’allonger à mesure qu’il avançait, ses couloirs étirant les perspectives. L’air, lourd et immobile, pesait sur ses épaules. Chaque craquement du bois accentuait l’oppression du silence.

Les de Trécamelot avaient conservé une tradition humaine : dîner à la même heure que les mortels. Ils n’avaient plus besoin de nourriture solide, mais Elizabeth tenait à ce rituel. Les viandes rouges, toujours saignantes, parfois encore fumantes, rappelaient la vie qu’ils avaient quittée, un simulacre de normalité. Et, à côté des assiettes, des verres emplis de sang reposaient, offerts pour apaiser leur soif.

Arthur entra dans la grande salle à manger. La table centrale, dressée avec un soin maniaque, scintillait sous les chandeliers. Will, fidèle serviteur, attendait près du chariot chargé de plats savamment préparés. L’odeur de la viande grillée emplissait l’air. Arthur prit place sans un mot, sur la droite d’Elizabeth. Immobile, il attendit.

Le temps s’étira, lourd et figé, jusqu’à ce que des voix s’élèvent dans le couloir. Des rires feutrés, chargés d’une complicité intime. Elles prenaient leur temps. Un sourire amer effleura ses lèvres. Il savait pourquoi.

Elizabeth entra la première et prit place en bout de table, droite, souveraine. Sa robe de soie sombre épousait sa silhouette élancée, et son chignon tiré révélait la pâleur aristocratique de sa nuque. Carmilla suivit, s’asseyant à sa gauche, face à lui. Ses longs cheveux auburn, encore en bataille, encadraient son visage orné d’un sourire las, presque moqueur. Une fragrance d’ambre et de peau chauffée flottait autour d’elles, si dense qu’elle s’imprima dans ses poumons morts.

Il serra la mâchoire. Elles avaient fait l’amour avant de venir dîner. Et lui, il les avait attendues, tel un enfant puni.

Carmilla croisa son regard, une lueur amusée dans ses yeux noisette.

— Tu aurais pu nous rejoindre, dit-elle en ajustant sa serviette sur ses cuisses, le sourire accroché à ses lèvres pleines.

— Ne te moque pas, Carmilla. Vous auriez pu... attendre, répliqua-t-il d’une voix basse, vibrante de gêne et de mépris.

Will servit la viande avec sa précision silencieuse. L’odeur lui monta à la gorge, mais ce n’était pas la chair saignante qui l’oppressait : c’était elles.

Carmilla leva son verre de cristal, le fit tourner, et observa le liquide rubis à la lumière.

— Il y a des besoins qui ne sauraient attendre. Mais cela t’échappe, toi qui tiens tant à rester chaste... Un peu comme ton ancêtre, non ?

— Carmilla, cesse, trancha Elizabeth en entaillant sa viande avec froideur.

Arthur sentit les mots mordre sa peau. Oui, il était chaste. Non par faiblesse, mais par choix. Descendant de Lancelot, il portait le poids d’une faute ancienne : trahir son roi pour un amour interdit. Il s’était juré d’expier cette honte, de rester pur là où son aïeul avait failli. Autrefois, lorsqu’il chassait encore, il se contentait de laisser ses phéromones troubler la vigilance de ses proies, juste assez pour approcher, juste assez pour mordre. Jamais plus. Là où Carmilla faisait de la séduction un art et un jeu, et où Elizabeth aurait pu s’y adonner sans effort, lui se tenait à distance. Sa chasteté était son armure, son fardeau, sa rédemption.

Carmilla le détailla, un sourire carnassier étirant ses lèvres.

— Peut-être que ce garçon, aujourd’hui, pourrait t’enseigner ce qu’est la perte de contrôle, murmura-t-elle, voix sucrée, venimeuse.

Un frisson lui déchira l’échine.

Esteban.

Ce prénom brûlait en lui. Ce garçon n’avait rien d’un objet de désir charnel. Il était autre chose : un souffle sauvage, un écho ancien, une force inconnue réveillée au fond de lui.

La chaise racla le marbre dans un grincement sec lorsqu’il se leva.

— Tu ne comprends rien, dit-il, la voix tremblante de colère. Ce n’est pas du désir. Ce garçon... il est dangereux. Nous devrions nous en méfier.

Elizabeth posa calmement son verre, ses yeux d’acier ancrés dans les siens.

— Tu es troublé. Si ce n’est pas la Faim... alors quoi ? Méfie-toi, Arthur.

Il inspira, planta ses iris dorés dans les siens.

— Non. Ce n’est pas la Faim. Je suis seulement...

Le mot s’étrangla dans sa gorge.

— ... troublé, finit-il dans un souffle.

Troublé par ce qu’il avait ressenti. Par ce mélange d’effroi et de fascination. Par cette certitude obscure que ce garçon pouvait tout briser : sa pureté, son sang-froid, sa discipline.

— De toute façon, reprit-il plus bas, il disparaîtra avec la fin des vacances. Retournera là d’où il vient. Il n’aura été qu’un trouble insignifiant.

Carmilla soupira, déçue par ce qu’elle considérait déjà comme un spectacle manqué, et porta son verre à ses lèvres.

— Ennuyant, lâcha-t-elle.

Arthur ignora l’aiguillon. Il quitta la salle dans un silence dense. Les lourdes portes claquèrent derrière lui.

— Où vas-tu ? demanda Elizabeth, sèche.

— Respirer. Ou plutôt... m’éloigner de vous deux, répondit-il, la voix basse.

Aucune réplique. Il sortit.

Dehors, l’air nocturne le fouetta. Il ferma les yeux, laissant la brise froide traverser ses poumons immobiles.

Esteban. Ses yeux. Son odeur. Cette présence.

Une bête sauvage, tapie, attendant de se réveiller.

Et Arthur, dernier descendant de Lancelot, tremblait à l’idée de ce qu’elle ferait de lui.


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