La Roche des Fées est un site emblématique situé à La Bourboule, dans le département du Puy-de-Dôme en Auvergne, France. Ce lieu est célèbre pour ses formations rocheuses spectaculaires et les légendes qui l'entourent.

Auvergne : la légende de la Roche aux fées, par Juliette Norel

En un temps immémoré, dans le massif du Sancy, le granit formait un ossuaire naturel d’arêtes sombres, imposant un décor aussi impitoyable qu’un cimetière de géants.

La vallée, privée de ruisseaux limpides et de champs fertiles, ne présentait que quelques flaques de boue chaude suintant sous la roche, témoignant d’une eau tenue captive.

Le sol argileux, piqué de joncs sauvages, retenait les pluies rares et l’air vibrait d’un souffle trop timide pour nourrir une végétation dense. Seuls quelques lichens persistaient, vertes gerbes de résilience face à l’âpreté minérale.

Pourtant, au pied de ces tours anthracites, s’aventurèrent les premiers habitants : bergers à la recherche de pâturages d’altitude, forgerons attirés par un minerai oublié, familles en exil fuyant les plaines surpeuplées. Ils dressèrent des huttes de branchages et de boue, défiant la soif dans l’espoir d’un foyer.

Chaque soir, leurs marmites n’offraient qu’un bouillon clairsemé ; chaque matin, le silence de la terre aride rappelait cruellement l’eau qui ne viendrait pas.

Leur soif prit l’allure d’une prière.

Autour d’un cercle de pierres dressées, ils frappèrent les échalas de bronze et entonnèrent d’anciennes incantations.

Ils invoquèrent la Terre-Mère puis l’Esprit des Eaux, suppliant enfin l’éclosion de sources bienfaisantes.

Lorsqu’enfin résonna sous leurs pas un léger frémissement, l’air se mit à palpiter.

Au clair de lune, dans la brume cristalline, un mince rayon d’argent glissa sur la pierre, révélant des silhouettes diaphanes. Les fées, logées depuis toujours au cœur de la roche, apparurent aux hommes, enveloppant la vallée d’un voile d’humidité apaisante.

Leurs doigts, fins comme des racines, parcoururent les fissures de la roche ; un souffle chaud éveilla le creuset minéral.

D’abord une goutte timide, puis un chœur de perles d’eau dévalant le rocher jaillit en un chant cristallin.

Jour après jour, elles sculptèrent la vallée naissante : là où le sol n’était que poussière, elles semèrent des mousses vert tendre ; là où s’accrochaient quelques fougères engourdies, elles tissèrent des tapis mouvants, drapés de rosée.

Peu à peu, l’aridité céda place à un réseau de ruisselets murmurants, chacun portant la promesse d’une vie nouvelle. L’air s’embauma de résine et d’humus réanimés ; le granit, jadis impitoyable, se fit berceau d’une flore insoupçonnée.

Mais, sous la surface conquise, l’obscurité grondait encore.

Des démons ténébreux, nés des entrailles fumantes du sol, surgirent, spectres d’ombre et de suie, cherchant à engloutir la magie jaillissante.

Les fées, unies par un serment de sororité, dressèrent un cercle de lumière.

Leurs mains s’entrelacèrent, leurs chants tissèrent un rempart contre l’avalanche sombre.

lors de la nuit d’équinoxe, en un souffle commun, elles firent vibrer les veines du granit, élevant une muraille de pierre et d’eau.

Puis, quand la lune bascula dans l’ombre, elles unirent leur ultime force.

La Reine, souveraine de ses sœurs, lança aux étoiles son dernier sortilège : d’un éclat fulgurant, elle se mua elle-même en monolithe, gardienne pétrifiée de la magie des eaux.

Autour d’elle, ses compagnes se figèrent en dômes de granit, offrande silencieuse à l’équilibre retrouvé.

À l’issue de ce sacrifice se révéla La Bourboule : un écrin de verdure et de sources, dont le nom chanterait désormais la douceur et la guérison.

Et si, aujourd’hui encore, vous posez la main sur ces rochers, vous percevrez peut-être le léger frémissement d’ailes éteintes.

Sous la rugosité de la pierre millénaire, la lente palpitation de l’originelle : l’éternelle Reine des fées d’Auvergne.

Auvergne : la légende de la Roche aux fées, par Jean-Christophe Mojard

La Roche aux Fées

Au cœur de La Bourboule, où coule la Dordogne,

Se cachent des cours d’eau de sources éphémères,

À l’abri des regards des sorciers noirs qui lorgnent

Le pouvoir ancestral des nappes aquifères.

Nul ne peut les entendre, à moins d’être aussi pur

Que les ondines et fées qui dansent et chantent en eux :

C’est ainsi qu’on ne trouve, au sein de la nature,

Que des empreintes étranges en des restes boueux.

Mais à chaque mystère il est une exception

Pour que naissent légendes au cœur des traditions :

Et la Roche des Fées en possède bien une.

C’est un enfant perdu, pour sauver son village,

Qui entendit le chant des créatures hors d’âge.

Elles se laissèrent tarir pour cet enfant de Lune.

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Illustration par Mistral