La petite pièce sans fenêtre ne sent pas toujours bon.
Forcément  …
Tout le monde y fait la même chose -
souvent.

Mais Hanaé sait maintenant qu’il y a un remède magique, maman en a parlé l’autre jour avec une amie :
« Il faut acheter des bâtons dansants ! »

Ce pour quoi aujourd’hui Corentin (son meilleur ami) et elle attendent devant la porte des toilettes.
Papa en sort.

- Qu’est-ce que vous faites là tous les deux ?
- T’as pensé à mettre les bâtons ? préfère répondre sa fille
- Quels bâtons ?

Pas question de lui dire leur secret !

Heureusement maman arrive, chasse tout le monde, entre bravement dans le local laissant par chance la porte à demi ouverte ...

... Un craquement
Un souffle léger
Enfin maman se pousse et Hanaé aperçoit un - un seul ? - bâton long et mince qui fume sur la tablette accrochée au mur.

Maman referme la porte.
- Allez ouste ! Allez jouer dans la chambre.

Ah Non !
Pas maintenant que le spectacle va commencer.

Les deux enfants font semblant de repartir et dès que le vestibule est vide, ils recourent jusqu’aux toilettes et s’enferment dedans
À ⅭⅬÉ
pour plus de sécurité.

Hanaé tâtonne dans le noir pour allumer la lampe.
Corentin est déjà assis et tapote la place à côté de lui.
Elle s’y installe.
La fumée du bâton se tortille grâce au bout tout rouge, faisant monter avec elle une forte odeur qui pique la gorge.

Tant pis !

- Il en met du temps !
- C’est parce ce qu’il se concentre ; avant de danser il faut faire le vide dans son corps.

Corentin hoche la tête (Hanaé sait beaucoup de choses).

- Il faut en mettre deux, comme ça ce sera plus facile pour lui que de danser tout seul.

Quelle bonne idée !

Hanaé se lève pour prendre la boîte dans laquelle sont rangés les bâtons.
Mince !
Comment faire ?

- Ta maman a pris les allumettes.
Hanaé sourit (Corentin voit beaucoup de choses).

- Regarde ! S’exclame-t-il l’arrêtant net.

Planté très droit tout à l’heure dans son socle plat, le bâton commence à osciller pour descendre lentement -
on dirait presque qu’il rebondit -
s’arrête juste dans un salut vers ses petits spectateurs.
Des bouts de cendre s’éparpillent à ses pieds tel un tutu en miettes
Il se fait plus petit,
tourne un peu vers la gauche
pour finir sur une dernière volute qui disparaît au plafond.

On cogne et gronde très fort contre la porte.
AH ! 

Quoiqu’il leur arrive,

Ça valait le coup !

Photo de couverture et illustration : Chantal Perrin Verdier